Exposer des marines, voilà une idée bien difficile à défendre pour une galerie d’art contemporain qui a vu se succéder des œuvres de Dubuffet, Masson, Tapiés, Soulages, Raynaud, Duchamp, etc. Il s’avère que cette galerie appartient au Conseil Général des Bouches-du-Rhône et que, alors que tout un chacun s’apprête à fêter l’an 2000, Marseille se préoccupe plus de célébrer dignement ses 2600 ans. Ainsi considérée, l’évocation des ports de cette cité semble bien plus évidente.
Bien que les œuvres présentent un intérêt et des qualités inégales, l’accrochage est une réelle réussite. Il mêle des dessins de Marquet, une gravure de Vlaminck, une huile de Dufy, des photographies de Robert Doisneau, Henri Cartier-Bresson, Willy Ronis, des maquettes de bateaux ou des ex-voto dédiés à Notre-Dame-de-la-Garde. Pourtant, cette diversité n’empêche pas les pièces de se répondre, de se compléter, sans se heurter les unes aux autres. Seule l’installation vidéo de Knud Viktor semble davantage posée dans un coin de la galerie que réellement mise en situation. Le voisinage avec photographies d’un côté et ex-voto de l’autre ne lui fait pas profit.
Sous la neige, en été, à l’aube comme à la tombée de la nuit, les amours de Marseille et de la mer Méditerranée évoquent Pagnol à travers les photographies de cafés du Vieux-Port, les échanges internationaux d’un port industriel avec ses grands vaisseaux, la nostalgie d’un petit port de pêche où s’amarrent les barques, des images des calanques, du pont transbordeur, du ferry boat L’Escartefigue. Certains tableaux passent plus inaperçus, ils se confondent un peu entre eux. Le Port de Marseille d’Edmond Petitjean, celui de Joseph Garibaldi, Le Vieux-Port par temps d’orage du même peintre ou interprété par Jean-Baptiste Olive ; huiles bien sages, elles défilent devant les yeux sans vraiment retenir l’attention.
On s’arrête cependant un peu plus loin, séduit par le souci de minutie dans la retranscription de La Ville et son port réalisé par un peintre anonyme du XVIe siècle, ou par Les Bateleurs du Lacydon brossé vivement par Edgar Melik (voir photo). Les Ports de Marseille permettent en effet ces écarts stylistiques et ces bonds d’un siècle à l’autre ; réunis par la cité inspiratrice.