Il y a maintes façons de découvrir le Maroc, royaume aux mille facettes. La première est d’y aller et de prendre le temps indispensable de l’errance pour échapper aux multiples stéréotypes et éviter les écueils d’un folklore de pacotille et les circuits touristiques aseptisés, sentir une culture vécue dans sa profondeur, ses ambiguïtés, sa complexité. La seconde ? Abandonner les slogans et les images toutes faites -« Maroc, pays de contrastes », « Le plus proche des pays lointains » ou encore « Pays chaud où le soleil est froid »- et commencer à tisser quelques liens au cœur même de la capitale avec cette terre arabo-musulmane séculaire. Il suffit aussi tout simplement de profiter du Temps du Maroc en France et de suspendre vos pas devant l’une des plus belles portes du Maghreb, voire de l’Orient : la Porte Bab el Mansour de Méknès, reconstituée en taille réelle (40 m de large, 15 de haut, 25 de profondeur) place de la Concorde, entre l’Obélisque et le jardin des Tuileries, depuis le 13 avril dernier.
L’idée : sensibiliser le public à la richesse de l’art marocain à travers l’un des plus beaux fleurons de son patrimoine. Heureuse initiative ? Bien mieux : une gageure, un exploit technique, artistique et humain, issu de l’imagination et de la volonté partagée de Frédéric Mitterrand et de Tajeddine Baddou (commissaires généraux du Temps du Maroc en France). Pour échafauder cette structure habillée de 3000 m2 de toiles peintes, les poncifs ont été tracés directement à partir d’une nacelle sur la Porte de Meknès elle-même. Cette technique permet de transcrire de la manière la plus fidèle l’esprit et les détails véritables d’architecture et les effets dus à la patine du temps. Les couleurs (rouge de Marrakech, ocre jaune, terre brûlée, terre d’ombre, vert turquoise) échantillonnées sur le site même de la Porte de la Cité Impériale ont été reproduites quasiment à l’identique, l’inscription des ombres portées reflétant les effets du soleil et du volume. La construction de la structure porteuse et la confection des bâches ont été quant à elles réalisées en France ; les toiles ont été expédiées à Meknès afin d’être peintes par des artistes et des artisans marocains.
Difficile de ne pas être troublé par cette architecture éphémère (travail titanesque) qui anime actuellement la plus belle des perspectives parisiennes. Dans l’alignement exact de l’Arc de Triomphe et de la Grande Arche. Les sceptiques seraient bien avisés d’aller y jeter un coup d’œil attentif. Ceux qui ont eu le privilège d’admirer cette aquarelle vibrante de vie, où se mêlent les couleurs, les lumières et les ombres, ces combinaisons géométriques inimaginables, ces myriades de petits morceaux de terre vernissée, ces rosaces et ces étoiles, le savent bien : le monde se divise en deux, ceux qui ont vu La Porte, et les autres. Celle-ci nous parle du Maroc, de tous les marocains. Nul besoin de viatique pour revenir à la cité des origines saluer le souffle de l’histoire, de la légende et d’une œuvre exemplaire, illustration parfaite de l’association des savoir-faire marocain et français. Un des événements phares du Temps du Maroc en France.