Le comportement de l’Homme face à la mort relève rarement du rationnel. Pratiques occultes, conservation de reliques ; il y a à la fois le refus de la disparition définitive par la simulation de la vie dans la dépouille mortelle et un respect craintif pour la Grande Faucheuse, puisqu’au final, la mort sait toujours tout… Du respect, donc. La pénombre qui accueille le visiteur de l’exposition l’implique immédiatement, comme dans un lieu de culte. Des courbes de toile fine tombant du plafond protègent crânes et squelettes, telles des reliquaires. Elles créent un parcours sinueux et leur transparence permet des jeux d’ombres, multipliant chaque silhouette sur le sol et sur les toiles. Mise en scène d’apparitions et de disparitions, du réel et de sa trace.
A l’intérieur de ces écrins de tissu, des mannequins funéraires, orbites vides, fixent pourtant chacun d’entre-nous d’un regard effrayant, la bouche entrouverte. Ils sont parés de bijoux, d’habits brodés ou d’armure. Il semble que rien ne soit assez somptueux pour rendre hommage à ces saints et initiés disparus. Dans d’autres écrins, des crânes sont remodelés à l’image du défunt afin de mieux rappeler la vie. Parfois, ce n’est pas l’apparence physique qui est maintenue mais l’esprit du défunt, grâce à des motifs décoratifs peints.
Toutes les pièces présentées impressionnent par la valeur de sacré et la peur qu’elles portent en elles. Ces rites, loin de paraître primitifs, comme le pensaient les colons occidentaux, nous renvoient à nos propres angoisses. A cela s’ajoute la pénombre du lieu qui appelle, nous l’avons dit, le recueillement. En parcourant La Mort n’en saura rien, notre position de simple spectateur devient d’ailleurs presque gênante face à ces objets de vénération ou de souffrance.