Samedi 5 juillet. 17 heures. La deuxième journée de l’édition 97 du Rock Thorout, accueille ses véritables premiers héros avec la présence de Radiohead. Enlisé dans de la boue gluante, le public s’ébroue lentement pour accueillir la frêle silhouette d’un Thom Yorke aux cheveux ras, chanteur torturé d’une formation qui ne l’est pas moins. Après deux chansons tirées d’Ok Computer, le groupe a déjà pris ses marques. Il joue à la perfection, avec une cohésion qui donne aux morceaux une puissance brutale et une énergie bienfaitrice. Même les multiples subtilités mélodiques de Paranoïd Androïd viennent nous caresser les tympans pour composer une plainte déchirante, aidées en cela par la voix puissante, aux accents bonoiens, de Yorke.
Une heure plus tard, c’est un autre gringalet qui a fait chavirer son monde. Beck et tout son petit cirque présentent un set des plus toniques, avec comme à son habitude scratchs virtuoses, harmonica endiablé et costume de cow-boy. Clou du show, une longue version rappée de Loser, au cours de laquelle le jeune freluquet s’en prit musicalement à un esthète qui essayait de lui faire goûter la boue belge.
Nous passerons charitablement sur l’ennuyeuse prestation de Jamiroquai, pour en arriver à l’un des grands événements de la soirée : le retour en Europe des Smashing Pumpkins. Mais cette tournée des festivals sent un peu trop le “prend l’oseille et tire-toi” pour susciter un réel intérêt. Les morceaux de Mellon Collie ont subi un lifting inutile et des titres comme 1979 ou Ruby semblent frappés d’anémie. Déboussolé et les jambes de plus en plus lourdes, le public boude poliment la fin du set, en attendant patiemment Prodigy.
Il est presque minuit quand un déluge de lumières accueille le groupe, sur les beats fracassés de Smack my Bitch up. Suivent Breathe, Serial Thrilla et une bonne partie du dernier opus. Toutes crêtes dehors Keith Flint, harangue la foule de sa voix nasillarde, derrière lui la moulinette à samples fonctionne à merveille. Une partie du public quitte tranquillement la place, d’autres s’en foutent et dorment enlacés sur la boue devenue dure, balayée par le petit vent frais de la nuit. Ils ne seront même pas réveillés par le feu d’artifice final, qui clôt près de 15 heures de musique non-stop. Dans la boue.