Il y a deux sortes de concerts de Van Morrison, qui ouvrait les festivités ce soir-là : les bons et les mauvais. Rangeons de suite celui de La Villette dans la seconde catégorie. Etait-ce du professionnalisme poussé le plus loin possible ? Toujours est-il que l’Irlandais et son groupe n’ont pas du tout songé à rendre vivante leur musique. Le vieux gars en noir semblait ailleurs. Il retournait sans cesse en coulisses, sans doute pour voir si on ne pouvait pas le libérer plus tôt, pour qu’il aille se coucher. Si bien qu’au bout d’une trentaine ou quarantaine de minutes, le public dépité attendait de pied ferme la vedette américaine de la soirée.
Il y a deux sortes de concerts de Bob Dylan : ceux pendant lesquels il chante et joue (le jeu) et ceux où il s’applique à saccager ses propres chansons pendant que son groupe tente de sauver la mise. Rangeons de suite le concert de Paris dans la première catégorie et ajoutons que l’on pourrait même amorcer l’idée d’une troisième : les concerts où Bob Dylan redevient génial, quand il ne cache pas le plaisir qu’il a à se retrouver sur scène devant un public de fans venus pour lui. Lorsqu’arrivent sur scène les quatre (jeunes) musiciens qui accompagnent le Zimmerman, le public ne cache pas son désir de les voir racheter la (plus que) pâle prestation de Van Morrison. C’est en smoking sur santiags avec cravate de cow boy et chapeau Blues Brothers que tous se présentent. Alternant morceaux rapides et tempi lents, versions électriques et acoustiques, le Bob et son groupe se mettent le public dans la poche en quelques chansons. Mais surtout, le rénovateur du folk a joué, et bien joué.
Pas de simagrées, pas de retenue, Dylan nous a même gratifié d’un superbe solo façon mandoline sur The times they are a-changing’ en formation acoustique avec une contrebasse fabuleusement présente. Bob Dylan n’hésita pas à jouer du pelvis à la manière de qui vous savez ; beau spectacle !
La version de Desolation row fut tellement chaotique et torturée que la chanson en était méconnaissable (jusqu’au fameux cri « Desolation row !« ). A nouveau un solo (dans l’hyper aigu) nous rappelle, si besoin était, que Bob Dylan demeure un merveilleux maître de son instrument. Vers la fin du set, le Zim nous offrit une version haletante et à rallonge (mais quelle rallonge !) de Highway 61 revisited et alors que la salle était éclairée par les incontournables projecteurs blancs, le public fut en délire (même les petits vieux !) sur un Rainy day women nos 12 & 35 complètement déjanté, final excellemment choisi avant la reprise de Hughes Aufray, Souffle dans le vent (!) en dernier rappel.