A l’heure où pullulent lucrativement les compiles d’ambianceurs à la Claude Challe, véritables opérations marketing gravées sur CDs, répertoriant les sons et atmosphères d’un lieu (Café Costes, Buddha Bar), entre cocooning, nesting, lounging et fooding, il ne manquait plus qu’une compilation du genre dédiée à un seul designer, une marque de fabrique, un style, plutôt qu’un lieu proprement dit. C’est chose faite, par l’entremise opportuniste de Tricatel (qui aura bien du mal à s’écarter dès lors de son étiquette branchouilla qui lui fait plus de tort que de bien), avec cette David design imaginary discoteca, compilée par Olivier Rohrbach en l’honneur d’un créateur de meubles suédois (eh oui, il n’y a pas que du bois Ikea en Suède).
Quoique la compilation soit sensée représenter musicalement le travail du designer (on dira alors que c’est zen, synthétique, plutôt blanc, plutôt plastique), cette discothèque imaginaire n’échappe pas aux limites du genre, à la resucée d’une recette éprouvée et un brin lassante. Car si l’on fait la somme des mixs ainsi dédiés à un lieu ou une atmosphère, celle-ci ne dépareille pas la tendance easy-listening électronique, trip-hop chic, qui a alimenté le compte en banque de Claude Challe… Malgré la présence un brin décalée des artistes du label (Burgalat en tête, mais également Houellebecq ou Dj Me Dj You), la somme des titres ici mis bouts à bouts, est variablement jazz-planante, easy-exotique, house-BCBG. Un mélange de groove discret et de nappes réverbérées, qui permet tant la méditation post-humaine que la conversation feutrée. Une musique plus bourgeoise que bohème, noosienne, qui entoure bien mais qui n’entoure rien.
Les titres mainstream de Alex Gopher ou Grand Tourism, un remix du Good life d’Inner City (Arthur Baker) par Thomas Schumacher, se succèdent en douceur dans des fondus enchaînés qu’on ne remarque pas. D’ailleurs, on ne remarque rien. Le disque est passé, on l’a à peine entendu… Dommage pour certains titres, qui ne méritaient pas un tel traitement. David design imaginary discoteca prône une certaine vision de la musique : fonctionnelle, désincarnée, fond sonore, papier peint… On aimera toujours mieux la musique qui sait provoquer des émotions et nous parler un tant soit peu.