Auteurs des albums Them et The No music, entre autres, Jel et Dose One ont donné leurs gaufrettes et autres fichiers .wav à remixer à plusieurs amis ou invités. Le résultat est inégal, mais pas dépourvu d’intérêt. The No music of aiffé commence par deux remixes de Themselves par eux-mêmes (facile), qui ne sont pas déplaisants, surtout lorsque Jel branle les breakbeats avec allégresse et les fait nager sur de jolis synthés (Terror fabulous, the no music of hospitals). Il y tique la voix de Dose, qui passe du talkie-walkie au vocoder en un clin d’oeil. On passe ensuite par Hat set for butler, proposé par Matth et Controler 7, ce dernier étant connu pour son bon album « officiel » Left handed straw sorti en 2001 sur Anticon. On ne sent pas trop la patte du garçon et cette portion n’est pas vraiment inoubliable, tout comme le Poison pit remixé par Why ? (tes cuts de voix sont hideux mon vieux…). Gageons que sa version plaira sans nul doute aux fans de Hood, qui reconnaîtront ici une boucle de guitare sèche empruntée à l’album Cold house. On se demande alors s’il y a une erreur de tracklisting. Puisque Hood nous propose à la suite un remix de Livetrap. Non non monsieur, il s’agit bien de Why ? C’est Héraclite qui le dit, made in Switzerland bitte schön… Les post-rockers de Hood se déchaînent ici en nous posant une bombe à la rythmique saccadée, bourrée de disto, sur laquelle se casent de brillantes parcelles de synthés et autres guitares enchevêtrées dans des ondées de voix sauce Dose. Brillant, brut et concis, ce remix constitue sans nul doute un des meilleurs passages de cette galette. Il déplaira aux fans de Primo, mais on s’en fout. On espère que Hood ira dans cette direction pour leurs prochains travaux. Les portions d’Alias, Grapedope (membre de Tortoise) et Hrvatski servent de délayage. Et même si quelques bonnes idées germent ici et là pour celle Hrvatski, on est quelque peu déçu. On attendait peut-être un peu trop de l’auteur de Oiseaux 96-98, récemment signé chez Planet-Mu.
En revanche, Odd Nosdam propose un You devil you bien tordu, qui commence par une ligne de synthé stridente, convertissant une scie à métaux vocalique en stratosphères vaporeuses aux séquelles gentilles. L’auteur de No wigs for Ohio y place ensuite un beat chaloupé, enrobe le tout de mouillées angoissantes et de voice-samples soignés. « Eux-mêmes » y parlent de diable et d’envoûtement, Odd Nosdam le vegan ricain se déchaîne doucement, place des éclats de foule et des rugissements d’homme-animaux. Le morceau est terminé ? « Non » dit une voix de robot qui se branle avec Dose One. Le rappeur reprend la suite en rimant sur les breaks de Nosdam le bizarre. Les synthés giclent, les nappes analogiques se croisent subtilement et fracturent les voix du rappeur. Une étonnante petite tranche, sur laquelle la voix de Dose colle à merveille. Vient ensuite un exposé de The Notwist. Attardons-nous un peu sur ceux-là, ils le méritent. Cette formation originaire du pays de Helmut Kohl (il nous manque un peu ce gros teuton, non ?) a commencé à balancer des sons à la fin des années 80. Pour ceux qui ont découvert ce groupe avec le cinquième et bienveillant album Neon golden, on conseillera d’aller écouter Shrink, une petite beauté sorti en 1998. Pour revenir à Out in the open donc, The Notwist propose ici un court-bouillon enflammé aux riffs de guitares angéliques, aux sons synthétiques cachés et délurés. Les breaks de batterie rock se baladent entre les voix laconiques de lutins sortis d’outre tombe : un délice de folk tendu, enfermé dans une grotte qui résonne. Gretschmann a-t-il largué son keyboard sur la tête de Jel ? On sent la touche Console enclenchée ça et là, la mayonnaise prend et c’est la félicité en fin de morceau… Bravo. La fin est réservé à Electric Birds, le projet solo de Mike Martinez (Deluxe Records), un bon gars qui traîne du côté de chez Mille Plateaux, dîne avec Matmos et Blectum from Blechdom. Son remix est difficile à digérer, mais s’avère tout de même convenablement étalonné. Un brin casse-tête, il fourmille de mini bruits blancs et autres beats dansants, puis revient ensuite vers des portions de breaks aimables. Au final, The No music of aiffé est plutôt escarpé, difficile à diviser ou à grouper. Il ne plaira bien évidemment pas au fans de hip-hop purs et durs, ceux qui pensent que c’est de la musique de rappeurs gais et / ou gays. Il est aussi très loin d’atteindre la qualité des opus précédents de Them(selves). Comme on dit si souvent des albums de remixes, nous avons ici à faire à un opus en demi-teinte…