On avait promis de le faire alors on tient promesse. Et c’est finalement assez joyeux que je me lance aujourd’hui dans une chronique du premier album officiel des américains The Rapture. Car je me souviens avec amusement de sa première écoute pendant une soirée entre amis, où ce ne fut pas seulement l’alcool qui déclencha l’hilarité générale, mais bien ce piteux Echoes. Qui aurait aussi bien pu s’intituler Plagiat ou Copie, puisque tout ou presque dans ce disque s’inspire avec une rare grossièreté d’autres chansons d’autres artistes, d’un passé plus ou moins lointain et plus ou moins connu. Dès le morceau d’ouverture, Olio, qui singe à la perfection le chant de Robert Smith et restitue avec une fidélité maniaque le timbre de piano des Cure 1981, c’est un grand éclat de rire général qui secoua l’appartement où nous profitions d’un apéritif dînatoire tout à fait parisien. Ils avaient osé ! La suite dévoila un disque dont le niveau de putasserie et de racolage atteint des sommets, même pas sauvé par les quelques titres de punk festif à la manière Gang of Four / Radio 4 / DFA (dont le multiprogrammé House of jealous lovers, qui restera, lui et heureusement, dans l’histoire du rock). I need your love ressemble ainsi à un morceau acid-house de 1988, pas très loin des pires moments des Happy Mondays (comme un très mauvais remix d’époque de Hallelujah par exemple). « This is not a love song ! » entonna-t-on en choeur à la suite des premiers couplets de Echoes, pitoyable resucée du standard de PIL. Open up your heart est un titre ménageant la chèvre Radiohead et le chou Otis Redding sur une production faussement naturaliste et des textes confondant de stupidité. Heaven est une chanson proto-punk new-yorkaise reprenant insidieusement la signification chrétienne-paranoïaque des américains fondamentalistes (« rapture » veut dire « enlèvement » et évoque aux USA les disparitions mystérieuses d’individus qui seraient en fait « enlevés », emportés au ciel…). Des disques qui provoquent à ce point l’unanimité, tant ils sont ridicules, sont rares. Echoes est une sorte de juke-box disco-punk créé par une major à destination des jeunes générations ignorantes, qui achèteront stupidement imagerie (new-yorkaise) et illusion de nouveauté, quand tout cela n’est que redite, imitation et âneries.
On aurait aimé être plus gentil avec le nouvel album des Strokes, mais on ne voit pas trop comment, et on se bornera à répéter ce qui a déjà été dit partout, à grands renforts de couvertures de magazines : « les Strokes ont fait le même album que Is this it, mais en moins bien ». Si on a certes plaisir a retrouver ces mélodies tendues, ces ambiances Velvet-Television et le grain de voix filtrée par un vieux micro, on attend aussi d’un artiste qu’il se renouvelle et s’éprouve lui-même, car sa créativité en dépend. Si leur premier essai a sans doute été le meilleur album pop de 2001 (n’en déplaise aux snobs), celui-là ne s’écoute déjà plus : pas de mélodie réellement fredonnable, effet de surprise passée. Le single 12:51 et le primesautier Between love and hate (encore une très belle ligne de basse) sauvent à peine les meubles d’une formule qui se répète et n’est plus si magique que ça. Même si il n’y a absolument rien de honteux dans ce nouvel album des Strokes (tout de même bien au-dessus de la plupart des clones en The de cette automne-hiver 2003), on se prend à imaginer ce qu’une collaboration réussie avec Nigel Godrich aurait donné, par exemple…