Difficile de croire que ces quatre jeunes femmes au sang chaud vivent en 2001 en Californie. C’est pourtant bien le cas : The Donnas nous viennent tout droit de cet Etat où le rock semble uniforme et aseptisé, en partie à cause de groupes comme Off Spring ou Blink182. Il serait donc intéressant de comprendre pourquoi ce groupe s’évertue à faire revivre le punk-pop (ou le néo-hard-rock-bubble-gum, appelez ça comme vous voulez) depuis maintenant quatre albums -en trois ans- à coups de riffs tendus et paradoxalement souples, façon Chuck Berry sous amphétamines. Pour résumer, ce quatrième album des Donnas -qui, au passage, est le premier à être un tant soit peu médiatisé ici en France- mélange punk rock fin 70’s et hard-rock crasseux et grossier du milieu des 80’s. Et si les outils de comparaison ne sont pas toujours éloquents en termes de rock, ils sont ici nécessaires. Impossible, par exemple, de faire l’impasse sur la comparaison avec Joan Jett et les Runaways, tant pour l’attitude que pour la musique. Moins valorisant, il est aussi difficile de ne pas penser au son des premiers albums des Guns N’Roses à l’écoute de Turn 21, mais cette malheureuse influence s’oublie relativement vite grâce à l’absence de soli de guitares slashiens. On pense alors tour à tour aux Ramones, aux Nashville Pussy, qui auraient pris un quart de Lexomil (il leur faut au moins ça …) et à Veruca Salt, en plus libidineux.
Une fois sorti des influences (trop ?) évidentes de The Donnas, on peut alors jeter une oreille attentive à cet album. D’abord le titre : Turn 21, les dés sont jetés, on sait d’ores et déjà que tout cela sent l’émancipation féministe, de celle qui propose une liberté sexuelle féminine sans concessions. Les grandes lignes générales de l’album se retrouvent sur deux titres : 40 boys in 40 nights et Play my game, où les quatre charmantes demoiselles prônent leur droit à décider de leur corps, de leurs nuits, et par extension, de leur vie sentimentale et sexuelle sans passer pour des bitches. Toutes ces revendications font de cet opus un disque résolument sexy, tendance revival 70’s, avec une fierté féminine qui ne s’octroie pas pour autant le droit de ridiculiser l’autre sexe. En gros, The Donnas désirent acquérir une épanouissante féminité avec les hommes, et non contre eux. Et s’attarder prioritairement sur les textes de ces chansons n’est pas si inutile qu’il n’y paraît. Tout d’abord parce qu’on connaît la musique : couplet-refrain-couplet-refrain servis par une rythmique rock’n’roll, et ensuite parce que sans se lancer dans des textes profonds façon Elliott Smith ou Smashing Pumpkins (au hasard), les quatre gentilles sauvageonnes réussissent à dire des choses qu’on pensait évidentes mais qui ne le sont plus forcément aujourd’hui, comme l’égalité (la réelle) entre les hommes et les femmes, et le tout de manière intelligente et naturelle. Turn 21 arbore à l’intérieur exactement ce qu’il propose en façade, à savoir le droit et la responsabilité qu’implique la majorité, surtout celle des filles, dans un monde où la « californication » dont parle Anthony Kiedis fait oublier la liberté individuelle. A défaut d’être un chef-d’œuvre, cet album a au moins le mérite d’avoir des choses à dire, celles-ci étant dites par des femmes qui aiment les hommes qui aiment les femmes.