Les Dodos, gros oiseaux disparus des îles lointaines, étaient trop stupides pour s’enfuir quand les colons Portugais les chassaient pour leur chair tendre et savoureuse. Ce duo tout en plumes de San Francisco n’a pourtant rien d’une espèce en voie de disparition, faisant son nid dans une basse-cour psyché-folk élevée au bon grain, entre le Collectif Animal, High Places ou Yeasayer. Perchés sur des branches de guitares (bois et boyaux), tapant follement du bec contre les troncs (tribu élevée en batterie), battant des ailes à tout va (claque et envol), les Dodos sont de drôles d’oiseaux secs, un peu poulets décapités (tout en nerfs), un peu plumes de paon (où le trippé verra un oeil). Ca chante et piaille dans les arbres, descendant d’une espèce protégée (Jody évoquant les Crazy rythms des glorieux Feelies, dont on attend toujours le revival), communiquant avec les autres bêtes à plumes par des mélodies que l’on siffle longtemps après, des ritournelles aérées et volatiles, qui passent sur les ondes,. Ca vole très haut.
Godard disait : « On ne sait plus apprécier le silence des églises. ». Les montréalais Wolf Parade, de leur coté, enfoncent le clou en enregistrant ce nouvel album dans celle (Mount Zoomer, qui donne son titre à l’album) qui sert de studio à leurs camarades Arcade Fire. Improvisations coupées et remontées, les neuf chansons cousent des pièces d’étoffes neuves à un vieil habit, en un patchwork progressif (le finale Kissing the beehive dure près de 11 minutes, entre intro en prière et conclusion boum-boum qui fait danser les filles). Ca navigue entre power-pop indé et glam rénové (phrasé Bowiesque), maniant le shift tempo comme on sermonne. L’eucharistique Fine young cannibals fait moins penser au groupe homonyme 80’s qu’aux guitares claires de Television (comme le souligne ostentatoirement leur label, malin). Le reste grimpe la montagne sacrée, martial croisé emphatique, au lyrisme tranchant, précis et énergique. Bon esprit de Noël, mais la messe était déjà dite sur le précédent Apologies to the Queen Mary. Si vous aimez la pop-Blogothèque poilue, ça le fera.