The Vault, puis la mise en vente de 7 CDs de samples de lui, voici qu’il produit ce nouvel album de The Artist. On était sans nouvelles de lui depuis Come en 1994, Prince ayant alors fait place à « Love Symbol » puis « The Artist ». Mais peu importe que ce soit par schizophrénie ou par opportunisme qu’il rendosse son vieux costume, cela suffit à nous faire tendre l’oreille, car le bougre, entre apparitions médiatiques et concerts-surprise, semble en forme.
Et, le temps du premier morceau, Rave Un2 the joy fantastic, sur lequel il retrouve le son de guitare de Sign O’ the times ou Lovesexy, on se met à espérer beaucoup. Prince soigne à nouveau sa production, laisse de l’espace au lieu de le boucher et époussette au passage une boite à rythmes datant du single Sign O’ the times. « It’s late and I’m running out of clever things to say, the kind that would bring a girl like you to tears » miaule-t-il sur le beau The Sun, The Moon and stars, enchaînant chant suave et rap ludique. Tangerine, puis Silly game, avec son synthé « flûte de pan » ridicule et drôle, confirment sa santé retrouvée, mais des horreurs comme Wherever U go, Whatever U do, limite Simply Red, ou Baby knows (avec Sheryl Crow, dont il reprend aussi Every day is a winding road façon fiesta funk, moins bien que l’original !) nous calment vite.
Au cours de ses 20 ans de carrière, Prince s’est rarement frotté sur disque à des stars de son statut. Hormis des duos avec Madonna ou Kate Bush, il s’est surtout associé à des ex-stars qu’il a ressuscité (Mavis Staples, Larry Graham) ou à des jeunes qu’il a pris « sous son aile » (Jill Jones, Carmen Electra, Sheena Easton, souvent des filles), on était donc curieux à l’annonce des invités réunis sur cet album. Hélas Chuck D (Public Enemy) est sous-employé, Gwen Stefani (No Doubt) tire le disque vers le rock US banal, Maceo Parker fait ce qu’il fait dans son sommeil, et Ani Di Franco n’apparaît que pour quelques secondes de guitare, ce qui vu l’étoffe du personnage est insensé. Quel gâchis ! Seule Eve, des Ruff Ryderz, sort du lot sur le taquin Hot wit U, taillé pour les radios.
Le problème de cet album souvent agréable, c’est qu’il n’a rien à dire. Prince a beau être poly-instrumentaliste distingué, aucun souffle ne porte ces chansons, on n’y sent pas de cœur. Et si le nouveau Beck semble plagier Prince, c’est qu’après tout celui-ci pratique depuis 15 ans les mélanges décomplexés chers au « loser », avec le risque (atteint ici) que le vagabondage stylistique occulte le fond. Attention, on se surprend à penser que finalement l’album The Vault n’était pas si mal, ce qui veut tout dire. Il n’y a plus qu’à attendre les chutes de studio de la période Prince & The Revolution, encore annoncées récemment, et une nouvelle fois espérer ne pas être déçu.