Evadé de l’asile de fous Gonzales-Peaches-Mockie qui avait écumé les scènes européennes avec des sets furieux d’electro hip-hop, le berlinois Taylor Savvy fait une échappée en solo sur ce premier concept album dansant et fumiste. Croonerie répétitive comme les motifs de la moquette du salon de danse qui illustre la pochette, cet album de « slogans songs » se pose entre la musique fonctionnelle de Brian Eno et la célébration techno-house du Queen, avec ses beats secs, ses loops simples, ses gimmicks simplistes et ses slogans hédonistes. Répétant à l’infini et de toutes les manières possibles « Everybody party » ou d’autres slogans du même acabit (de deux mots), sur des boucles de vieilles boîtes à rythmes electro, Taylor et ses amis commet là un joli suicide commercial, à ranger entre tartufferie ou pur génie dans les rayons de votre discothèque.
Comme Gonzales, Taylor Savvy s’amuse avec les codes de la pop-culture, surfant entre le rétro ratpack et le post-modernisme le plus abstrait, c’est-à-dire retirant toute chair et tout sens au discours, pour en faire une boucle sonore tournant sans fin dans un centre commercial souterrain. Cela peut sonner groovy (des loops de beatboxes Roland s’avèrent diablement efficaces) ou ennuyeux (comme une transe synthétique ou un CD rayé). On ne glosera pas longtemps sur l’intérêt musical d’une telle initiative (question de goûts), mais on saluera l’ambition de son auteur : mettre en disque la belle vacuité de la musique communicationnelle, pour lui soutirer sa légère poésie, abstraire le pire du monde sonore du grand marché global pour en faire ressortir le meilleur. Malgré lui.