Clairement l’un des plus beaux disques de « musique française » -terme employé par Sylvain Chauveau lui-même- à être paru récemment, Nocturne Impalpable raconte le silence de la nuit, en ville.
Volontiers contemplative, simple et répétitive, la musique de Sylvain Chauveau déroule ses volutes mélancoliques et son piano minimal au gré de 19 compositions, reliées entre elle par le fil ténu d’une ville endormie et d’une nuit régnante. Nocturne urbain, mouvement qui clôt le disque, en est la focale. Le caractère légèrement narratif de l’ensemble est volontiers brisé par quelques écueils et bribes d’expérimentations sonores Cette succession de mouvements est hautement poétique, en raison notamment de la beauté de ses titres (Doucement le grain de sa peau, Arachnéenne encore, Je me suis bâti sur une colonne…). Elle possède également une cohérence toute cinématographique, comme une bande son oubliée d’un film de Bresson, rejouée à l’époque actuelle, comme le laissent entendre les scories électroniques de Ocre.
Le morceau suivant, avec son orgue hypnotique, nous plonge au delà de terres déjà reconnues par Labradford circa Mi Media Naranja. Ce morceau insuffle une profonde émotion humaine et organique à l’ensemble. Les samples que l’on retrouvait sur le premier album solo de Sylvain Chauveau, par ailleurs membre de Micro : Mega et d‘Arca, se sont quasiment tus, remplacés par un silence musical et une mélancolie encore plus vastes. Le Monde intérieur donne le ton de cet album, croisement de Satie et des Rachels dans une salle obscure. « Adieu vive clarté de nos étés trop courts/Demain nous plongerons dans les vastes ténèbres » écrivait Baudelaire. Ce disque constitue à coup sûr la musique de cette descente magnifique, avant de revoir cette vive clarté estivale.