Suede est de retour. On attendait un album novateur, en rupture. Mais on se retrouve avec un Head music plutôt mineur. Pourtant, ça reste tout de même une bonne nouvelle. On peut même avancer que cet album 100 % et banalement suedien (avec 3 titres dispensables : Indian strings, Hi fi et et Crack in the Union Jack) placera définitivement la formation de Brett Anderson comme majeure -pour ces dernières années-, au moins en Grande-Bretagne. On ne donnait pourtant pas cher de Suede à ses débuts, vers 1991 : arrogants et sponsorisés à outrance par les leaders d’opinions médiatiques. A cette époque, Suede excitait certes mais fleurait bon son éphémère. Suede, en effet, ne s’en est sorti qu’avec le deuxième album attendu et quasi descendu par les suceurs de la veille : Dog man star. C’est le tournant pour Suede, qui choisissait en effet de rester sur son postulat fondateur : glam & larmes, et laissait ainsi passer hype, tempête et Bernard Butler (guitariste démissionnaire). Désormais ce serait Suede qui ferait sa mode. Depuis, beaucoup de groupes ont sombré dans l’oubli (Gene, Shed Seven), mais Suede est toujours là. Conclusion : Suede avait raison. En creusant le même sillon (charte graphique, accords enflés et explosifs, paroles socio-déprimantes), Anderson, fils de famille modeste qui se rêvait en Bowie universel, à défaut de l’être devenu, a eu l’intelligence de bâtir une œuvre d’artisan, honnête et cohérente. Un pré carré (dans lequel on retrouve peut-être Placebo) où sont plantés les étendards du panache et de la fierté envers et contre tous.
Head music ne déroge donc pas à ces règles. Pas de révolution, à peine une évolution, l’auditeur averti et bowiephile notera un léger embrayage d’Aladdin Sane vers Diamonds dogs (Down, sommet romantique de l’album). Mais Head music est suffisamment truffé de rock songs de haute tenue (Electricity, Time will flow ou Everything counts), dont les londoniens gardent la précieuse recette, le Savoir faire (un des titres en forme de clin d’œil). Enfin, She’s in fashion (bien vue la dérision) est étonnamment fraîche et chaloupée. Un must sans prétention mais imparable.
Au final, la nouveauté réside certainement dans le fait qu’on se surprend à apprécier Brett Anderson, alors qu’on l’aurait bien claqué il y a quelques années. Modeste et sympathique, sa machine Suede s’avance toujours aussi rutilante, mais sur ses lauriers. Head music est un album de fin de cycle agréable, mais la suite a intérêt à étonner. Suede devra se sublimer, maintenant qu’on voit qu’il est bien là.