London symphony orchestra, dir.MIchael Tilson Thomas1957. La presque fin d’une époque bénie entre toutes, décennies glorieuses d’une révolution culturelle débutée exactement quarante ans auparavant par le scandale d’un Sacre. L’Ermitage succombait au joug bolchévique, cependant qu’une bande de joyeux russkofs mettait à feu et à sang -enfin, presque…- le théâtre des Champs-Elysées, stupéfait par le spectacle qui venait de s’y produire. Stravinsky-Balanchine-Nijinsky, et quelques printemps plus tard, l’horreur déboulait sur le continent européen tout entier. La saison russe des States pouvait débuter.
C’est cette époque américaine de Stravinsky outre-Atlantique que ce disque formidable de MTT se propose de faire revivre, pile poil quarante (autres) années après l’un de ses points d’orgue : la création, le 1er décembre 1957, de Agon, au City Ballet de New York. Un chorégraphe et un compositeur au zénith de leurs carrières -et de leur inégalable collaboration-, et le dernier volet d’une trilogie commencée en 1928 (Apollon musagète) et continuée en 48 par Orpheus. La virtuosité, le brio, l’humour de la partition répond note par note au génie de Balanchine -à moins que ce ne soit l’inverse… A 75 ans, Stravinsky pêle-mêle musique baroque et musique sérielle (Boulez commence tout juste à pointer le bout de sa baguette), se joue des styles et des époques, bref, s’amuse comme un gamin.
Dans Agon, comme dans toutes les autres pièces magistralement interprétées par le LSO et son chef invité principal : cette réorchestration de l’hymne national US qui valut à Stravinsky quelques déboires avec la police, l’Ode, la Circus polka (autre collaboration avec Balanchine), d’autres encore, et jusqu’à ce Greeting prelude, adaptation alla Stravinsky de Happy birthday et dirigée par Munch, le 4 avril 1955, pour les 80 ans du maître Monteux ! Quand on vous parlait d’années glorieuses…