Edité sur le désormais mythique label Blue Note (« the finest jazz since 1939 » !), ce nouvel album de Ludovic Navarre (aka St Germain) arrive en pleine vague fusionnesque entre jazz à la cool et electro pas trop stressée. La recette est bien connue et il suffit d’une instrumentation acoustique légèrement électrisée pour faire illusion dans le monde bien encombré des nouveautés electro-jazz du moment. Et si la France semble n’avoir découvert que récemment ce monde harmonique différent, il faut bien avouer que ce que produisent actuellement Ludovic Navarre ou autres Eric Truffaz n’est qu’une plongée plus ou moins brillante dans le jazz-rock décomplexé des années noires de Miles Davis, période Agharta ou Get up with it.
Dans Tourist, St Germain installe un son electro-jazz harmonieux et élégant. Servie par un combo discret et technique (trompette, saxo, flûte, claviers, percus, voix), leur musique sait s’imposer rapidement par son souffle quasi funky, ses accents black syncopés et l’omniprésence électronique de claviers rythmiques. De ce grand charivari ressort un son propre et puissant, seventies dans le grain mélodique et diablement actuel dans les couleurs. Truffaz avait un peu déçu avec son évolution proprette ; ici Navarre, dans les mêmes territoires, convainc de par sa capacité à faire copuler sans heurts les genres musicaux. Rose rouge, le titre ouvrant l’album, en est l’exemple le plus frappant, avec ses incursions soul, latino, electronica et jazz-fusion. Un album peu surprenant peut-être, mais d’une efficacité et d’une élégance redoutable. Que demande le peuple ?