Celui qui un jour s’attaquera à l’écriture de la biographie de Neil Hagerty et Jennifer Herrema, fondateurs de Royal Trux, n’aura pas besoin de tirer à la ligne histoire de remplir un volume : le couple a mené une existence riche en déglingues diverses avant de se ressaisir. On plaint en revanche le malheureux chargé de visiter la discographie du groupe à géométrie variable. Neil et Jennifer ne se sont jamais spécialisés dans un genre musical précis, à moins que le « royal trux » ne forme une catégorie en soi.
Et avec Pound for pound, sorti quelques mois après Veterans of disorder, ils recommencent. On les imagine écoutant leur collection de disques avant de s’enfermer en studio, cherchant quels courants retraiter. La nouvelle moisson offre un intéressant zapping dans l’histoire de la musique populaire du XXe siècle, leur façon, sans doute, d’entrer dans un millénaire neuf. Ca commence très fort, avec Call out the lions, hommage au rock limite métalleux des années 70, batterie lourdingue et intro à la guitare qu’un membre des Eagles ne renierait pas. Même décennie pour Fire hill, mais cette fois, des visions de platform shoes et de paillettes viennent hanter l’auditeur qui tape du pied pour accompagner ce magnifique tempo glam’ garanti pur plaisir crétin. On peut voir un clin d’œil au métal des années 80 avec Teenage murder mystery, version Royal Trux, heureusement. Et flairer des relents de Blues Explosion avec Accelerator.
Ce serait pourtant simpliste et réducteur de ne voir en Royal Trux qu’un vulgaire tribute band. Après tout, le groupe emprunte ses points de départ à droite ou à gauche, mais les enfourne dans sa redoutable machine à réinterpréter, les distordant à jamais. Le résultat est comme toujours dissonant, fouillis, tapissé de bruitages inattendus et des grognements et cris gutturaux du couple. On ne change pas une formule qui dérange.