On avait pris l’habitude de compter Neil Hagerty et Jennifer Herrema, l’ossature de Royal Trux, au nombre des losers magnifiques et parfois pathétiques dont la mythologie rock regorge. Régulièrement décevants sur album, enthousiasmants sur single et en tout cas générateurs de performances scéniques chaotiques (c’est-à-dire un coup mortelles et l’autre archi-crispantes), on s’était dit que la meilleure des choses à faire était de ne plus compter du tout sur eux. Advienne que pourra. Avec un nouvel album annoncé à grands coups de promo (toutes proportions gardées, ces gens-là ne sont pas Garbage ou les Smashing Pumpkins, ni même Pavement, plutôt des icônes underground à ranger aux côtés de Lydia Lunch ou Jon Spencer), on ne s’attendait à rien de particulier, mais quand même ça faisait bizarre de voir qu’on leur prodiguait le même traitement qu’aux groupes indies dont les maisons de disques ont décidé que « maintenant, ça va marcher, on va créer la hype, la mayo va prendre, ils -nous !- vont en bouffer ».
Et ma foi, surprise surprise, voila-t-y-pas un Accelerator qui, sans les faire passer dans la catégorie des Formules 1, leur permet de se positionner en bonne place en Indy Car. Ca tient la route cette affaire, avec pourtant tous les attributs classiques de la bagnole Royal Trux : jolies mélodies le plus souvent consciencieusement salopées, du boucan en veux-tu en voila, des digressions péquenaudes, des poses rock crade dépassant l’entendement, de la dope qui suinte sur à peu près chaque sillon, rimmel et gerbe coulants en prime. Oui mais voila, allez savoir : une production un rien plus homogène, quelques morceaux un peu mieux balancés, ca tient parfois à pas grand chose, un bon disque. Et celui-là, c’est le bon.