Avec ce troisième album, Our aim is to satisfy Red Snapper, Red Snapper s’échappe progressivement du carcan musical dans lequel il s’était laissé enfermer dans son précédent opus, Making bones : un mix de funk hardcore et de drum’n’bass jazzy trop rigide et trop basique pour émouvoir. Cette évolution a été provoquée par la récente série de coups durs dont ont été victimes Richard Thair (batterie), Ali Friend (basse) et David Ayers (guitare, programmation). Décès, ruptures ont profondément affecté les membres de Red Snapper. Il en résulte une musique plus profonde, plus mélancolique, qui n’oublie pas pour autant ses racines dancefloor.
Ainsi, Some kind of kink et The Rake restent dans la ligne traditionnelle du groupe : du jazz-funk hargneux, oscillant entre hardcore et acid-house. Sur des boucles de batterie martelant des rythmes implacables et oppressants, les programmations de David et les raps de MC Det achèvent de donner à ces compositions une atmosphère de paranoïa urbaine. Néanmoins, une mention spéciale à The Rough and the Quick, ode crue mais sensuelle à la levrette furtive, chantée par Karime Kendra, une belle catcheuse noire californienne : « Come on, My tongue, Lick my clit, A bit of your spit, That’s it, Open up my thighs from behind, Ride a little, Rough and quick… » De même, Bussing et Don’t go nowhere, en mélangeant à la perfection spiritual jazz 70’s et instrumentaux hip-hop, ont de quoi rendre jaloux DJ Shadow.
La surprise vient plutôt de Alaska Street, Belladonna et They’re hanging me tonight, superbe succession de morceaux tristes et épiques dans lesquels Red Snapper renoue avec l’expérimentation musicale. La musique se fait plus introspective. Acoustique et électronique fusionnent avec évidence. Belladonna dégage une beauté étrange, glaciale et organique, proche d’un This Mortal Coil qui aurait apaisé ses démons intérieurs. Le morceau de bravoure de Our aim is to satisfy Red Snapper est certainement They’re hanging me tonight, composé par David Ayers, qui offre un vaste champ d’improvisation rarement utilisé avec autant de finesse par ces musiciens. Une révélation et, espérons-le, une nouvelle orientation pour Red Snapper.