La mort -ou en tout cas la privation des sens vitaux- a toujours été un des thèmes récurrents des Pixies, amenée par la violence -physique et surtout morale- et la frustration, toutes sensations aliénantes que l’on a pu ressentir à l’écoute de beaucoup de leurs morceaux. Car les Pixies ont toujours eu une conscience sociale, ou à tout le moins une perception exacerbée du genre humain, dont leurs chansons furent les fidèles relais auprès de nos oreilles. Débusquant et immolant par le son les désarrois d’une Amérique en perte de repères, les Pixies n’ont eu de cesse de dynamiter les canons de la normalité pour le fond, du bon et juste milieu pour la forme. En fait, ils ne faisaient que créer de nouveaux modèles, des modèles uniques, sur mesure, à la taille de leur talent et de leur volonté de renouveler le genre rock en en gardant les gènes traditionnellement contestataires. En ce sens, les Pixies étaient des punks, et il est donc normal, en 1997, soit vingt ans après l’explosion du mouvement punk, qu’ils se voient offrir le plus beau des hommages et la plus méritée des résurrections par l’intermédiaire de cette double compilation.
Si la partie studio n’offre pas de grandes surprises, mais une collection de hits imparables comme jamais Oasis n’en aura –Planet of sound, Here comes your man, Debaser, Wave of mutilation, Bone machine, Gigantic, Where is my mind ?, Velouria, Monkey gone to heaven pour n’en citer que les plus évidents, le disque live est franchement exaltant. C’est avant tout un témoignage très précis de ce que les Pixies pouvaient donner sur scène : un groupe d’un étonnant statisme, quasi figé, mais d’une densité hors du commun. La plupart des titres, comme si la chose était possible, gagnent encore en profondeur et en efficacité, dans un effrayant mélange de compacité et de sensualité : Hey, magnifique ode aux paumés du coeur, avait rarement revêtu autant de fervente gravité, Crackity Jones, fameuse morsure de vipère qui donne l’occasion à Joey Santiago, guitariste cyclothymique et mésestimé, de maltraiter d’importance ses six cordes. Surviennent Something against you et Tame, deux études comportementales de la plus grande violence -ceux qui assistèrent aux prestations des Pixies n’ont certainement pas oublié la gueule de fou furieux de Black Francis lorsqu’il bramait ces titres là. Agrémenté des morceaux les plus connus et de quelques autres un peu oubliés mais tout aussi passionnants et prenants (Ed is dead, Hang wire ou Into the white), ce live a tout ce qu’il faut pour rafraîchir la mémoire des nostalgiques, initier les infortunés retardataires et inspirer des regrets tardifs mais qu’on espère vifs aux impénitents réfractaires à ce groupe qui fut, n’en doutons plus maintenant, l’un des plus grands de la dernière décennie.
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