Après avoir louvoyé quelques années dans les contre-allées du songwriting international, sorte d’Elliot Smith scandinave, publiant plusieurs albums honorables mais pas forcément mémorables, Nicolai Dunger a trouvé son pygmalion en la personne de Will Oldham, rencontré lors d’une tournée avec Mercury Rev. C’est d’ailleurs la photographie de pochette, très bluegrass qui nous a mis la puce à l’oreille concernant Tranquil isolation. Au dos, on y voit en effet le porche enneigé de la maison de Moody Pike et son arbre dénudé, immortalisé par Will Oldham. Tous les protagonistes de cet album se retrouvent par ailleurs sur les polaroïds qui figurent dans le livret. C’est Paul, le frère de Will qui a enregistré ces sessions, les deux frères ayant par ailleurs produit cet album très sobre et dépouillé, à l’image de ces enregistrements de la fin février 2002.
Il est indéniable que le succès de ce disque réside dans l’environnement épuré de cette maison perdue dans les champs du Kentucky. En quelques jours, Dunger et les Oldham, assistés de fidèles musiciens comme le batteur Peter Townsend et la violoniste Jessica Billey, ont enregistré un album intemporel à la grâce évidente, qui n’est pas sans rappeler la classe absolue de Ease down the road dernier chef-d’oeuvre en date de Bonnie Prince Billy, avant la sortie prochaine de Master and everyone début 2003. Les compositions du bien nommé Tranquil isolation possèdent une quiétude rare, jouées à la cool dans le salon et la salle à manger de la maison familiale. Will joue ici du piano sur Going home for Christmas et délivre quelques harmonies vocales incroyables au gré de ces 13 chansons, clé de voûte de cet édifice suédois bucolique. Il semble ainsi guider littéralement la voix de Dunger, qui rend un fort bel hommage à un songwriter de l’Oregon sur Tribute to Tim Hardin.
Un ange passe dans la campagne du Kentucky. L’ange des heures bleues d’hiver et d’une mélancolie bucolique teintée de blues suédois. Le disque de Nicolai Dunger est cet ange impassible, isolé et tranquille.