Premier véritable album pour ce jeune Suédois au vague à l’âme communicatif, This cloud is learning se révèle être un voyage musical, aux ondulations terriblement empreintes de la marque des plus intéressants song-writers américains de ces dernières années. Dès la première écoute, on ne peut s’empêcher d’y trouver des parentés avec Will Oldham du groupe Palace et l’incontournable Elliot Smith (le titre Butterflyin’ friend). La façon naturelle qu’a ce grand blond scandinave de poser sa voix fissurée sur des compositions simples, mais envoûtantes -où orgue, piano et guitare sèche s’accordent à merveille- donne l’impression que Dunger n’en est pas à son premier opus, qu’il maîtrise bien la chose, qu’il est là depuis longtemps… Il est vrai qu’il a déjà à son actif deux petits albums expérimentaux, signés sur des labels suédois, faits de programmations et de bidouillages lo-fi. Mais ces derniers n’ont pas le potentiel de ce nuage mélodique aux sonorités bien travaillées, aux textes d’une sensibilité émouvante et torturée (« I sell my soul to happy eyes. I sell my soul to everyone that makes me happy inside », Something in the way).
Un rien déprimant, This cloud… reste cependant un disque agréable et émouvant, pourvu d’une mélancolie envoûtante et délicate, qui s’impose dès l’ouverture, avec le sublime This town. Cet album très prometteur renferme une douce tristesse, où la voix de l’artiste s’offre de façon sereine et sinueuse, où l’atmosphère, en apparence calme, renferme un spleen intensément fertile. Les tonalités éreintées de Dunger ont pour effet de le ranger aux côtés d’une pléiade de compositeurs talentueux, mais peu connus, tels Damien Jurado, voire le collectif américain Whiskeytown. On ne va pas non plus crier au génie, mais force est de constater que l’Amérique et ses indépendants n’appartiennent pas seulement aux Américains. Et que les nordiques comme Nicolai Dunger (ou Stina Norderstam, Herman Düne, etc.) s’offrent le luxe d’empiéter, avec une aisance déconcertante, sur un terrain folk déjà bien occupé.