La porte s’ouvre. C’est un enfant. Qui fait visiter sa chambre. Sens dessus dessous, à première vue. Il ne joue pas avec des cubes dans sa chambre, mais avec des sons, des rythmes, avec sa voix. C’est un garçon qui aime la musique. Il joue à l’arrachée. Il assemble, ajuste, puis défait, déjoue. Il reste des chansons ?
Ça commence par quelques notes de mélodica, qui dessinent la scène primitive, Chaleur, ferveur, on adresse une prière dans la pénombre de cette chambre, les bougies se consument lentement. Leur flamme tremble, subitement, la petite soeur surgit, rajoute du vrai bordel, il faut tout refaire. Et on accompagne le mouvement. Parfois, c’est rude –Morfler, pour sûr, on morfle. Et tout devient clair.
C’est un homme qui a aimé et n’a pas aimé ne plus être aimé. Comment faire un tel disque, sinon ? On le comprend. J’aurais (merde à on) aimé faire un tel disque, c’est la pensée qui jaillit dès la première écoute. Pour combattre sa douleur, il construit des châteaux de sable en Espagne ; Barcelona, impressionnante clé de voûte de l’album, ressac de voix, déluge qui happe. On songe un peu à Wyatt : la faute au falsetto, la voix de tête, c’est ça ; tout est dans la tête, les sentiments, l’océan, un océan-chanson. On ne lutte pas, tout bercé, on se laisse emporter jusqu’à la plage suivante.
C’est un magicien sans formules. Précieux par nos temps de repli. Ce qu’il montre, ce monde qu’il nous ouvre, on aimerait bien le visiter plus souvent, y vivre plus longtemps. On guettera ce phénomène futur.