La première chose qui surprendra l’auditeur à l’écoute de Big calm, deuxième album attendu fort longtemps de Morcheeba, c’est l’esprit roots qui plane sur tout le disque. On aurait pu s’attendre à un opus gavé jusqu’à la gueule de technologie dernier cri, et certes elle n’est pas absente, mais elle est condamnée à l’ombre, comme mise à l’écart au profit de sonorités plus organiques, plus naturelles -et de la voix vraiment splendide et pure de Skye. Les basses, quant à elles, sont toujours aussi profondes : c’est une des recettes du succès du groupe.
Guitares blues, claviers psychés, penchants folky, certains trouveront à Big calm des accents insupportablement rétrogrades, d’autres au contraire s’en délecteront. Les critiques, si critiques à formuler il y a, ne sont pas à chercher du côté des options harmoniques retenues.
Non, les réserves peuvent venir d’une certaine uniformité qui se dégage à l’écoute, et qui est due, sans doute, à l’usage exagéré des mid-tempos. Peu de cassures, et si le style est fluide -c’est également l’une des marques de fabrication maison, on se prend à regretter le peu de risques pris.
Du coup, il faut attendre le sixième morceau, Bullet proof, pour sortir de la douce torpeur dans laquelle on était enfermé, et ce grâce à quelques scratches bien balancés et une rythmique légèrement plus soutenue. Ou tant qu’à pantoufler, on prèfère encore Over and over, comptine toute calme qui fait penser à du Joan Baez version black, et même Fear and love et ses arrangements de cordes soyeux comme c’est peu permis, sa petite pointe de trompette à la Miles.
Surpoduit cet album ? C’est bien possible aussi, et en conséquence, Friction, incursion raggae-ragga, ne tient la route que cahin-caha. Morcheeba s’est cette fois-ci embourbé dans un excès de zèle. Big calm, le dernier titre, est là pour attiser nos regrets, car ce morceau, avec un petit grain de folie dans son groove trop bien huilé, aurait pu être une véritable bombe. Pétard mouillé alors ? Non docteur, trop de pétards…