Same player shoot again. Pour son troisième obus (on ne dit plus « opus »), après Kala, Mathangi « Maya » Arulpragasam, alias M.I.A., sort l’artillerie lourde en un bataillon de producteurs à sa botte (Diplo, Blaqstarr, Rusko, Switch) et une rafale de hits (de « coups »). Parti en reconnaissance, le clip de Born free (un sample du Ghost rider de Suicide sur une batterie de batteries) par Roman Gavras, mettait en scène une dystopie esthétisante où des militaires hargneux font courir des rouquins dans un champ de mines, ou les abattent froidement, ces garçons aux cheveux moins verts que rouges illustrant les « minorités visibles », « nées libres », qui ne comprennent pas ce qui (va) leur arrive(r). Dommages collatéraux de cet engagement pour le multiculturalisme et le cosmopolitisme (elle défend notamment les tamouls du Sri Lanka et construit des écoles au Liberia), la miss s’est retrouvée épinglée par une journaliste du New York Times qui pointait des contradictions entre ses vues politiques et son mode de vie. M.I.A. a répondu du tac au tac en twittant le numéro de portable de la journaliste. Bref, c’est la guerilla. Tout ceci dit, que reste-t-il de ///Y/ (Maya), nouvel album ?
Déjà, The Message commence par le tapotis de doigts sur un clavier d’ordinateur, redoublant l’imagerie hacktiviste qui flotte sur le design (les barres de players internet partout, la typographie pirate du titre, le morceau écarté de l’album Internet Connection) et déclarant Maya zone libre (quand bien même la copie pour les journalistes arrive watermarkée). Le deuxième single, XXOO joue aussi du langage teenage-internet, mais sur une pop-eurodance Madonnesque un peu rance, et un refrain geignard de pop-star abattue en mission (« You want me to be somebody who I’m really not »). Hormis ce syndrome Isla bonita (un morceau par communauté), le baile-funk martial (tambours partout), le rap psychotique (le très allumé TeqKilla – binge drink au goulot numérique – rappelant Missy Elliott), le dancehall musclé (Muscle, bien nommé) et cette machine qui tue les fascistes (la guitare, saturées sous toutes ses cordes compressées, sur la merveille Meds & feds) servent en beauté un flow en retrait mais pas moins vindicatif, glissant vers la comptine énervée sur Story to be told, comme si M.I.A. retournait ses armes (le storytelling) contre le système, et la violence des mots, contre la violence sociale. Kamikaze.