En 1990, la Grande-Bretagne est engorgée de groupes hip-hop. C’est le règne des Demon Boyz, Hijack et autres Gunshot. Peu de groupes se dégagent du lot. Les London Posse parviennent à lancer leurs pierres sur l’édifice rap made in UK. Ce crew d’origine jamaïcaine, qui fleure bon la ganja, réussit à placer quelques titres dans les charts indé british. Le label Wordlab (Source), à qui l’on doit le très bon album des Mark B & Blade, réédite aujourd’hui le « meilleur » des LPs, plus de dix ans après le premier fait d’arme des London Posse.
En 90, on aimait bien les London Posse. Leur son ruff, leur dévotion pour l’herbe et les drogues douces, leur accent cockney méchamment tordu par leurs racines jamaïcaines, les prods de Sparski… Mais il faut bien avouer que, dix ans plus tard, le son du groupe anglais a plutôt mal vieilli. Ces deux MCs auraient peut-être mieux fait de fournir de nouveaux morceaux. On sent que cette compile se destine plutôt à la vieille génération du hip-hop anglais, celle de Daddy Freddy, un gars respectable mais dépassé, qui, faute de mieux, signe aujourd’hui sur d’obscurs labels albanais… On aimait bien Money mad et sa boîte à rythme explosive. Mais en 2001, son beat semble si lourdingue qu’on peine à écouter le morceau en entier. C’est vrai qu’on aimait leurs refrains ragga, leur croisement hip hop anglais et reggae roots. C’était il y a longtemps… et aujourd’hui, avec leurs vieux beats lourds et leurs flow détrempé, les gars de London ont du mal à nous séduire de nouveau. Il y a bien Dj Devastate (un des meilleurs dj de l’époque, qui s’occupait des excellents instrus des Demon Boyz) sur Jump, mais la recette des british est décidément trop vieillotte. On déniche pourtant quelques trouvailles ingénieuses qui forcent tout de même le respect. Pour exemple, cet étonnant sample de piano de Livin’ pancoot, repris il y a deux ans par les ricains Screwball, qui sonne juste et qu’on déguste avec saveur, mais qui s’égare au beau milieu d’un disque désappointant. Il y a aussi le superbe interlude Remedy for the black ash blues (sans conteste le meilleur passage de Gangster chronicle), où les cordes et le sample de trompette bluesy s’accordent à merveille avec la rythmique soul. Cependant, le titre ne dure que 47 secondes… On est tout aussi heureux de redécouvrir le terrible Pass me the rizzla (sorte d’élégie à la pure weed qui fut un des hit-single du groupe) et son refrain accrocheur et facétieux. Il en est de même pour le fameux How’s life in London (ah les soirées du Bobino…), qui s’ouvre avec les cloches de Big Ben, et qui vomit ses basses ronflantes avec fureur. Sur ce titre culte, où les rappeurs racontent ironiquement leur train de vie de « londoniens pure souche », on retrouve un célèbre sample de sirène zigzagante, qui fut repris par les mioches de Kriss Kross pour leur infamesque Jump.
Mais tous ces bons souvenirs ne nous permettent malheureusement pas de savourer cet opus comme au bon vieux temps, où la compétition ne faisait pas trop rage de l’autre côté de la Manche. Passons donc sur l’aura gangsta des London Posse, un des groupes charnière du hip hop anglais des années 90, et écoutons-le au présent. Ont-ils conservé leur éclat de thugs du ghetto ? Non.