Ayant sorti la jungle du ghetto underground, Goldie jouit d’une solide réputation auprès du public amateur de cette musique syncopée et gorgée de soul futuriste. Les soirées Metalheadz qu’il anime au Blue Note chaque fin de semaine l’attestent. Une faune bigarrée se précipite dans le quartier d’Hoxton (Londres) afin d’y entendre ce sorcier des platines, dealer d’un blues urbain possédant la chaleur du métal en fusion.
Autant le dire dès maintenant : son statut de star confirmée du genre n’a en rien réduit ses capacités à produire une musique composite (elle a une multitude de parents : soul, jazz, hip hop, rock, etc.) et protéiforme, séduisante par endroits, mais jouant, malheureusement, par moments, sur des recettes éculées et sans réelles saveurs. Le double album –Saturnz return/Mother– offre ainsi, dans l’ordre mentionné, deux facettes de ce catalyseur de convulsions : l’une d’un intérêt assez limité, l’autre attestant d’un réel talent pour offrir une plongée au cœur des sens.
Part 1 (Saturnz return) : Bien décidé à achever la décennie (pour le siècle, voire plus, se renseigner…) en beauté, Goldie opte de nouveau -après Timeless (1995)- pour des sons (les beats restent tous comptes faits décevants) schizophrènes, ultra-speed, mais sans ouvrir de perspectives plus alléchantes que cela (Roni Size, par exemple, a plusieurs longueurs d’avance). Quelques titres sortent cependant du lot. Il en est ainsi de « Temper Temper », avec Nöel Gallagher en invité pretigieux (?) à la guitare, et de « Digital » -avec les rappers de KRS One-, un morceau de jungle hard-step des plus remarquable.
Part 2 (Mother) : Véritable symphonie liturgique, cette longue plage musicale trouble les sens par sa fausse quiétude et ses voix déformées, comme sorties d’outre-tombe (celle de Bowie en particulier, sur l’ultime titre « caché » du disque). Passé les vingt premières minutes de deep-atmosphérique, la rythmique, couverte d’une section de cordes luxuriantes, se déclenche pour faire place à des mélodies étonnantes.
Mission partiellement accomplie, donc, pour Goldie, doux fanatique et expérimentateur de sons endiablés un peu vains, mais également capable de regagner, pour le meilleur, la mer de la tranquillité.