Aphex Twin est aujourd’hui devenu une référence ultime en matière de musique électronique. Les expérimentations multiples qu’il a développées ces dernières années constituent un point de départ pour bon nombre d’artistes chez Warp ou Rephlex. Comme si chacun d’entre eux avait pris comme base une parcelle de son œuvre pour la développer à sa manière : Autechre pour la recherche rythmique, Richard Devine pour la déstructuration, Mira Calix pour les mélodies ou, dernièrement, Bolton Nowell pour la folie pure, façon Come to daddy… Avec Fizzarum, nous avons affaire à un cas du même type. A la seule différence que celui-ci n’est pas signé chez Warp, ni sur Rephlex… Et alors ? Le fait de ne pas appartenir à la grande caste de l’electro anglaise devrait-il l’empêcher, lui aussi, d’apporter sa pierre à l’édifice ?
Avec Monochrome plural, Fizzarum se lance dans l’exploration des mélodies minimalistes, comme avait pu le faire Richard D. James dans I care because you do ou Selected ambient works. Il se contente de peu pour faire tourner ses morceaux : quelques beats secs et répétitifs, deux ou trois boucles de synthé… Il en résulte une atmosphère assez froide, créée à partir de papiers peints sonores aux motifs simples et géométriques. Mais quelques petits détails surgissent par moments pour remettre le tout en valeur, comme par exemple les infimes décalages rythmiques que l’on peut constater en écoutant attentivement Damper. Sur Micanex, Fizzarum joue la carte de l’obsessionnel : dix minutes d’ambient progressive, guidées par de légers drones. A vrai dire, ceux-ci sont quasiment impossibles à détecter lors des premières écoutes. Une puissance hypnotique se dégage alors de ce morceau, sans que l’on identifie vraiment d’où elle vient… De même, sur Microphorus, tout un jeu de parasitages résonants est déployé autour des rythmiques. Progressivement, on s’aperçoit que ces interférences dégagent une discrète ligne de mélodie, placée dans les très hautes fréquences… Arrive alors une ligne de synthé, qui s’accorde parfaitement avec les jeux d’harmonies dégagés par ce subtil phénomène acoustique.
Derrière ses allures d’ersatz aphextwinien, Fizzarum se révèle donc être un véritable illusionniste sonore. Chaque tour de magie qu’il déploie dans les neuf titres de Monochrome plural se laisse découvrir au fil des écoutes. Il suffit juste d’être patient pour réaliser toute la puissance générée par de tels arrangements. Attendre pour entendre…