DJ Serg a eu la bonne idée de nous concocter une petite compil réunissant quelques groupes de la Bay Area et de ses alentours. San Francisco est à l’honneur dans Golden state of mind, qui offre plusieurs fleurons du hip-hop de Frisco de la période 92-97. L’intérêt de ce disque réside essentiellement dans la présence de nombre de vieux titres perdus, inédits ou peu connus. En témoigne le terrible My world premiere de Charizma & Peanut Butter Wolf, qui fait la part belle à Charizma, Mc prometteur malheureusement décédé en 1993. On notera le très beau boulot Peanut Butter Wolf, le boss du remarquable label Stones Throw Records (Rasco, Quasimoto, Loopack, PBW, Rob Swift…) aussi connu sous le nom de DJ Bomb. Il livre ici des breaks de batterie rudes et claquants, sur lequel Charizma se déchaîne façon old-school. On retrouve d’ailleurs Peanut Butter sur Lunar Props, un instru captivant qui reprend le même sample que le Who got da props des Black Moon. Gageons que les amateurs de soul lui préféreront tout de même le morceau original de Ronnie Laws (Tidal wave), qui est issu du sublime Pressure sensitive de 1975.
Pour ceux qui auraient raté le coche, Golden State… permet de retrouver le morceau qui fit connaître les Blackalicious au public : Serg enchaîne avec habilité le très groove Swan Lake, avec sa petite basse bien ronflante et ses trompettes virevoltantes. Egalement au programme, Rasco, qui rime admirablement sur Hip hop essentials et Further dimention, un vieux titre des Various Blends – son ancien groupe – qui n’est pas sans rappeler l’esprit du Mahogany de Erik B & Rakim. La qualité vient aussi de groupes comme Hobo Junction (le très ajusté Rock the show), Big Nous (la bombe Just not my style), Encore (Architect remix de The Undercover), Grand The Visitor (une bonne version de Bring it Live), Bored Stiff (le Peaceful rotation de 92), ou encore The Dereliks (l’énergique The phrase that pays). DJ Serg a bien fouillé dans ces vinyles pour trouver ces titres. Pour exemple, la participation du collectif The Dereliks -un groupe obscur de San Jose- qui n’a à son actif qu’un seul EP : le très ignoré A Turn on the wheel is worth more than a record deal. La cerise sur le gâteau est sans conteste un des premiers titre de DJ Shadow (Entropy part C, D, E), qui fit découvrir le jeune Josh Davis au public en 1993, et surtout, qui lui permit de se faire remarquer par James Lavelle, le boss de Mo’Wax Records. On connaît la suite : Shadow offre à Mo’Wax le lumineux In/Flux, référence ultime en matière d’abstract hip-hop, qui précède le sublime Endtroducing, pièce maîtresse du « sampling sound » de la fin des années 90. On a également droit au Critical meltdown des Homeliss Derilex, dont le EP Survivin’ the game, sorti sur Malvado Records est introuvable aujourd’hui. En bonus-track, Serg livre un titre rare de Planet Asia : Machine guns, petite bombe pétillante idéale pour les dancefloors hip-hop.
Serg va droit au but et mixe plutôt bien, sans faire trop de fioritures ni d’effets impromptus (pas de commentaires de DJ ou de cris dérangeants). Golden state of mind permettra à nombre d’amateurs de hip-hop tranchant de (re)découvrir quelques classiques de la Bay Area Connection. Cette galette bien remplie présente en effet de bons vieux morceaux sortis tout droit des tiroirs d’un DJ inspiré, qui donne envie d’en savoir plus sur cette région des Etats-Unis.