White pony est le troisième album des metalleux-skaters à barbiche des Deftones, après le très réussi Around the fur (qui les a révélés) et Adrenaline (plutôt passé inaperçu), le tout sur Maverick, le label de Madonna (!). L’atout des Deftones : un solide sens de la mélodie et des guitares énormes (ce qui est toujours plaisant). Leur défaut : des chansons parfois un peu faibles et un chant qui, quand il n’est pas hurlant, couine comme chez Pearl Jam (ce qui est toujours un peu ridicule).
Onze morceaux donc, avec, en tête de ligne le super brutal Elite, qui à lui seul justifie l’achat de ce disque : quatre minutes de furie intégrale et de guitares déchirantes, entre Helmet et les vieux Tad (qui nous manquent), et toujours ce petit effet d’écho qui est leur marque de fabrique. Juste derrière, Korea est l’autre bombe du disque, mais n’atteint pas la puissance destructrice d’Elite. Les Deftones sont indéniablement de bons musiciens, le genre qui prend bien le temps de s’accorder avant de jouer sur un matériel haut de gamme, malgré leurs vilains tatouages. Ailleurs, Feiticeira nous fait le coup des vieux Red Hot Chili Peppers : ce n’est pas désagréable mais pas surprenant non plus. Digital Bath et Teenager sont des ballades plutôt réussies, d’inspiration indie-rock, sans la fragilité d’un Jay Mascis mais avec toute la grandiloquence de God Machine (dont on n’entend plus du tout parler d’ailleurs). Rx queen est un morceau mid-tempo avec force halètements et flanger : bof. Heureusement, Street carp renoue avec ce qui a fait le succès d’Around the fur, un habile mélange de mélodies et de rage (oui, contre la machine, bien sûr, mais en mieux tout de même. Rappelons-nous qu’on est là sur les plates-bandes de Kron et autres Machinehead). Knife party possède à peu près tous les défauts du rock FM américain actuel : refrains héroïques, breaks archi-prévisibles, etc. Peut néanmoins être touchant selon l’humeur. Avec Passengers, on touche à l’impardonnable : une imitation (probablement involontaire) de U2. Avec trémolos dans la voix et tout le tralala. Juste insupportable. Ils se rattrapent avec le bien senti Change (in the house of flies), réminiscence de l’emo-core de Fugazi (mais aux guitares plus grasses, nourries au fast-food). Et on termine gentiment avec les sept minutes de Pink Maggot, lent, plaintif et un peu ennuyeux.
Ajoutez à tout cela la panoplie habituelle de ce genre de groupe : promo efficace, site internet complet, partie interactive sur le CD, sortie parallèle de maxis en édition limitée et vous avez là le parfait petit groupe de rock pour MTV, qui saura séduire les teenagers américains sans trop les déranger. Un petit quelque chose sauve néanmoins les Deftones : leurs chansons. Tant que la moitié de leurs disques sera intéressante, on aura toujours une bonne raison de les écouter…