Vendu au tarif album, le nouveau disque de Will Oldham est en fait un maxi de six reprises, affichant une durée d’écoute d’à peine un quart d’heure. Sorti par le biais du très prometteur label indépendant américain Temporary Residence, ces six morceaux sont certes coûteux, mais indispensables tant pour les fans purs et durs que pour les auditeurs curieux.
L’exercice de la reprise tient chez Will Oldham davantage du tour de force que de l’hommage stricto sensu. Cet incontournable du songwriting contemporain est effectivement l’un des rares artistes à se réapproprier les morceaux des autres pour en faire de nouveaux trésors -à l’heure où l’improbable et besogneux Dave Navarro, pour ne citer que lui, massacre le Venus in furs du Velvet Underground avec l’assentiment de ce vieux con de Lou Reed en personne. D’ailleurs l’immense Johnny Cash ne s’y est pas trompé en reprenant l’an passé sur son bouleversant Solitary man -et en compagnie de l’auteur- I see a darkness.
Que Will Oldham se laisse tenter par les reprises n’a finalement que peu d’importance, car on est bien ici en train d’écouter un disque de ce bon vieux Bonny Billy, reprenant à son compte Someone’s sleeping de John Phillips (Mamas & Papas), Sweeter than anything de PJ Harvey, The Renderers, Bill Withers, Tim Mc Graw et même John Holt, le Doctor Love jamaïquain en personne. Assez cocasse et finalement pertinent quand on connaît le goût de ce dernier pour les reprises de standard country-folk U.S., d’Everybody’s talkin du regretté Fred Neil à If I were a Carpenter de Tim Hardin (également repris en son temps par le chanteur belge Johnny H.). En passant par Help me make it through the night de Kris Kristofferson.
On pourra regretter l’absence injustifiable de deux grands covers oldhamiens qui ont déjà donné lieu à de grands moments en concert : Big balls d’AC/DC, et surtout son interprétation lacrymale et magistrale d’Here today, gone tomorrow des Ramones. Tori Amos s’apprête à sortir en grande pompe un album de reprises (Neil Young, Depeche Mode et même les increvables Slayer) qui promet. Elle aurait fait des heureux en étant bien inspirée d’ajouter aussi à son répertoire le nom du commandeur Oldham.