Réédition des deux plus importantes œuvres de la période seventies, signées par l’excellent Bonga. Des œuvres d’une rare délicatesse, sensiblement marquées par cette voix chaude et rocailleuse, qui a tant marqué l’Afrique, bien avant les sempiternels discours développés autour de la world music. Un double album pour rendre hommage au talent d’un homme qui s’est souvent battu pour la reconnaissance de sa culture et la liberté de son peuple. D’abord à l’époque coloniale. Ensuite, pendant son exil. A Lisbonne, à Rotterdam, à Paris… Car c’est ainsi que s’égrène le chapelet d’histoires qui accompagne le destin de cet enfant rebelle, surgi dans les années 50/60 du fin fond des musseques, ces bidonvilles populaires où s’étale sans scrupules l’horreur coloniale en Angola. C’est là d’ailleurs, non loin de Luanda la capitale, qu’il fait ses premiers pas en tant que militant indépendantiste (il sera membre du MPLA, mouvement de libération nationale, par la suite). C’est là surtout qu’il joue de son premier instrument (dikanza, une percussion en bambou et baguette de bois), sa première arme devrions-nous dire, en compagnie de son père, qui est accordéoniste.
De là, viendra son engouement pour la populaire Semba, ancêtre de la Samba brésilienne, un genre qu’il pratique avec force, en interprétant ses chansons en kimbundu (une des principales langues du pays) et en se servant de la dikanza pour le rythme en contretemps. Sans oublier de s’inspirer également des danses rituelles (comme le kilombe-lombe). Un remarquable travail, étroitement lié à sa lutte pour l’indépendance, qui met l’autorité coloniale à bout de nerfs à l’époque. Au final, il sera obligé de partir. De s’exiler. En emportant avec lui la complainte nostalgique du retour. Un premier album, Angola 72, naîtra de ce vécu. Guitare acoustique, dikanza et quelques autres percussions… Il sera accueilli par un franc succès, notamment dans toutes les communautés lusophones africaines. Le second (Angola 74), énormément marqué par ses rencontres à l’étranger, viendra confirmer son attachement à sa culture originelle (le terroir, toujours la Semba), tout en démontrant son ouverture au monde (influences de la morna cap-verdienne et des rythmiques congolaises en vogue). Il l’enregistrera en compagnie du saxophoniste guinéen Jo Maka et du brésilien Sebastia Rocha (au berimbau). Il y interprétera un titre emprunté à la tradition cap-verdienne, devenu un tube depuis grâce à « la diva aux pieds nus ». Il s’agit de Sodade. En réeditant ces trésors, on vient en fait de faire œuvre de mémoire pour les mélomanes avertis, tout en saluant l’histoire et la culture du peuple angolais, longtemps baignées dans le sang de la guerre civile.
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