S’il peut inciter à redécouvrir ce joyau vocal enregistré en 1959 et -enfin- publié en compact-disc, le phénoménal succès de Lisa Ekdhal, dont l’exquis minois n’excuse pas toujours le manque de coffre, n’aura pas été vain : piquant, ludique et irrésistiblement séduisant, l’inimitable chant de Lolita de Blossom Dearie, expertement accompagnée par Ray Brown (contrebasse) et Ed Thigpen (batterie), donne à ce répertoire de standards signés Adolph Green et Betty Comden (dont les fondus de vieux longs-métrages des studios MGM ont probablement lu plus d’une fois les noms aux génériques), Leonard Bernstein ou Jule Styne un invraisemblable charme sensuel et taquin, tendre et irrépressiblement swingant.
On a déjà beaucoup écrit sur la douce ingénuité de ce timbre presque enfantin, légèrement acidulé, fragile mais jamais pris en défaut : on s’en voudrait pourtant de ne pas répéter une fois encore combien délicate et singulière devient chacune des chansons qu’elle s’approprie, légèrement soulignée par elle-même au piano. Ailleurs, c’est le guitariste Kenny Burrell qui vient se joindre au jeu, enrichissant encore l’univers décalé et magique de cet album -probablement l’un des meilleurs qu’elle ait enregistré pour le label. Comme un diabolo fraise, avec un je ne sais quoi d’enivrant.