Ces gars-là sont des loufoques, des escrocs au porte-monnaie démesuré mais à la musique sérieusement calibrée. Mélange de blues et de groove tout doux, on pourrait presque les classer dans la même catégorie qu’un Shaun Ryder et ses Black Grape pour l’attitude et la fascination envers les anciens standards dance. Ces membres éminents de la First Presleyterian Church of Elvis the Divine font une petite fixette sur l’imagerie et les perversions cachées de la religion. Dès le premier titre, Converted, le ton est donné avec le refrain « Let’s go back to church ». Pas de quoi tracasser les bons paroissiens, chez Alabama 3, autosatisfaction rime avec dérision : ils aiment à surfer sur la corde raide entre humour et mauvais goût, et qui prendrait à la lettre leurs exhortations manquerait à coup sûr une bonne partie de ce qui fait le sel de leur démarche. Avec leurs Stetson, leurs costards rayés et leurs baskets dernier cri, ils ne font que s’amuser avec les repères de notre société, ils bousculent un peu nos références sacrées, les leurs ne sont que musicales (Woke up this morning). Le risque est également de passer à côté, comme par excès de décontraction, de leurs meilleures morceaux –Bourgeoisie blues, Ain’t goin’ to Goa, Sister Rosetta– dont les chaloupements paresseux s’accordent parfaitement aux choeurs gospels détournés qui les accompagnent. Le cul entre deux chaises, l’auditeur prendra Exile on Coldharbour Lane pour ce qu’il est : un bon disque bien de notre époque, sérieusement délirant, au je-m’en-foutisme soigné.
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