Le cas n’est pas aisé à traiter. The Virgin suicides est la bande originale d’un film, celui de Sofia Coppola dont on ne vous dira pas de qui elle est la fille… On ne sait pas grand chose encore sur le film quoique les rumeurs font déjà état d’une bien belle œuvre sur toile… Mais revenons à la musique produite par nos Versaillais. Aucun doute possible : ça sonne bien musique de film. Ambiances, traitements sonores légers mais auxquels on a donné les moyens d’exister… On pourrait presque parler d’une lourde production, avec des moyens bien au delà de ce que les groupes français connaissent généralement au stade du second album. Disons qu’il a fait place au charme amateuriste des titres proposés sur le premier album, Moon safari. Côté production donc, on sent que le groupe a fait des progrès. L’espace et les traitements sont encore plus travaillés. Ces derniers sont d’une précision qui laissent pantois (notamment lorsqu’on écoute les titres au casque) et vert de jalousie si l’on est soit même musicien.
Le son n’est pas loin de celui d’un bon vieux Dark side of the moon en version quadriphonique ! Les compositions non plus d’ailleurs. Et c’est peut-être ici que nos deux compatriotes atteignent leur limite. En vérité, ne sont-ils pas seulement les derniers à produire cette musique que les trois « survivants » du groupe anglais ne sont plus en mesure de nous offrir depuis des temps immémoriaux ? Les notes éthérées de Dark messages le disent en long et en large : Air est ce que Pink Floyd, perdu dans ses conflits internes, aurait dû être en mesure de produire si…
Car la musique de Air, finalement, en n’utilisant qu’exclusivement les instruments de cette glorieuse époque malheureusement révolue, ne peut tirer d’autres sons et d’autres ambiances que celles produites par Roger Waters et les siens entre 1973 et 1978. The Virgin suicides, c’est un peu une part de More qui resurgit. C’est aussi Wish you were here et les quelques suivants. Rien de bien original, me direz-vous. Ceci dit, c’est peut-être justement ça l’originalité : produire la musique du plus grand groupe planant des années soixante dix alors que retentissent partout ailleurs les rythmiques martiales de la techno. Un balancement sur les premier et deuxième degré de la gamme et c’est parti. On n’a rien fait de mieux depuis Imagine mais Air tente quand même le coup. C’est bien essayé, mais vous voilà repérés les gars…