Paris – Barcelone. Un vendredi soir comme un autre, gare d’Austerlitz. Pere Delfour, journaliste d’une quarantaine d’années, est commandité par son rédacteur en chef pour pondre un papier sur la préparation des J. O. de Barcelone. Carte professionnelle : n’importe quel sujet. Une seule condition : les coudées franches.
Nous voilà plongés dans la marmite anarchiste, avec ce bref roman rouge et noir qui a toutes les allures d’un récit, tant lui colle à la peau l’histoire des libertaires durant la guerre d’Espagne. Pour preuve : Pere est le fils de Felipe Miralles, compagnon de Durruti. Ce dernier a vingt ans en 1936. Il est typographe au quotidien anarchiste de Barcelone. Grande époque de la C.N.T. – F.A.I. Les militants débordent d’activités, de conviction et d’idéaux généreux et humanistes. Les vrais maîtres de Barcelone ce sont eux. La fraternité enchâssée dans le cœur et la rage au ventre, ils bâtissent heure après heure un monde nouveau, « sans hiérarchie ni discipline, sans chiens de garde, ni laquais. »
Mais face à la violence des armes, force est de prendre le fusil. Et Felipe s’engage dans la Colonne Durruti. Puis s’enfuit -parcours exemplaire- et intègre la Colonne de Fer en mars 37, composée en partie de prisonniers du bagne de San Miguel de los Reyes, libérés par les anarchistes. Une légende noire que cette Colonne de parias, de bandits et de sans-âme. Une Colonne de rebelles purs et durs : « C’est au bourgeois et uniquement au bourgeois qu’ont pu et que peuvent encore porter préjudice nos activités, nos rébellions et cette envie folle, irrépressible que nous avons au cœur, de vivre libres comme les aigles des cimes et les lions des forêts. »
Roman d’histoire véridique, et roman de la Barcelone d’aujourd’hui, ville sauvage, grisante, magique, où pourtant la sensation d’euphorie et de douceur n’est qu’apparence, leurre, imposture. Par exemple, la découverte, à l’endroit où, le 19 juillet 36, Ascasso, le compagnon de Durruti, est tombé sous les balles franquistes, d’un monument commémoratif : une sanisette Decaux. Une éthique, une esthétique, une idée de banquier. « Les choses sont claires à présent ; le rouleau compresseur est passé. » Un roman qui nous montre que l’histoire n’est pas forcément un musée de l’ordre.
Sylvain Fourcassie – Les Assassins de Durruti
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