Ceci est un livre merveilleux. Deux livres en un, puisque la République du vent est reprise en « version comprimée » sur les huit premières planches… Un objet rare, une véritable exception, dans un domaine éditorial qui nous accoutume à la banalité, à la pesanteur et à la masse… Larguez les amarres et lâchez du lest… De quoi s’agit-il ? Un songe, une bulle, une ventosité, un air, un souffle, un sifflement, un monde rond, lisse et parfait, un pet rabelaisien, une enflure, un ballonnement, des gaz, une aérophagie, une homophagie, une anthropophagie, un culte vide, un cul au vent, une éructation, un trou d’air, un remugle gastrique, une rustine, un pneumatique semelles-au-vent et nez-en-l’air, une chambre à air, un caoutchouc, un gonflement, une dilatation, une pression atmosphérique, une divagation de bars en bars et millibars, des manches à air, des voies gazeuses, des tempêtes, des zéphyrs et de l’harmattan, des soupirs, une fuite éternelle, Éole l’éolienne, le roi du robinet à ent et effets navrants, des moulinettes à rien moulinant louffes, des brassées d’air dépressionnaires, des compressibles, des anti-décompresseurs, des rots et des rapports, des seigneurs du vent à effets de manches, des ventilateurs pour crânes vides… Ouf ! On respire enfin. Ici, tout vient du vent et va au vent, les drapeaux claquent au dessus de la fière République de l’absurde in vivo.
Les coulisses sont les nôtres, nos vices, nos habitudes, nos espaces restreints, nos suffocations, nos apnées volontaires, nos chimères et fumées pestilentielles, nos pompes à merde, nos vapeurs à sornettes, nos gris-gris, nos manies et notre époustouflante vanité emmédaillée et fière de l’être. Nous y sommes tous : chacun sa place dans la débourrée à postes et fonctions interchangeables. L’usine à vide tourne depuis des siècles et n’est pas prête de s’arrêter. L’agitation des courants d’air a l’éternité du Temps pour elle. Regardez, observez, et faites de même : tout y inspire et tout y conspire. Ce livre est un événement, un grand bol d’air dont on sort extraordinairement pensif, joyeux et ragaillardi ; un chef-d’œuvre de la Renaissance, vous dis-je.