L’anniversaire de la mort d’Oscar Wilde, qui succomba le 30 novembre 1900 à l’Hôtel d’Alsace, à Paris, des suites d’une infection chronique à l’oreille, contractée en prison (voir notre rencontre avec le petit-fils d’Oscar Wilde dans Le Mag), voit un certain nombre de publications fleurir sur les tables des librairies. Parmi celles-ci, deux ont retenu notre attention. D’abord, L’Album Wilde, dû à son descendant direct, Merlin Holland.
Le petit-fils de Wilde s’est imposé la gageure de donner en 20 000 mots la quintessence de la vie de son aïeul, sans complaisance ni forfanterie. L’ouvrage, magnifique, très anglais dans sa coupe, réunit à côté de ce texte l’iconographie la plus riche jamais rassemblée et commentée avec précision par Merlin Holland, qui a tenu à assurer lui-même la composition de l’ouvrage. On trouvera donc dans ce roman des photos de l’enfance de Wilde, de son entourage familial, quelques-uns de ses dessins, des pages de manuscrits pleines de son écriture ronde, les gravures d’Aubrey Beardley pour Salomé, des photos de voyage, prises avec son propre appareil, et bien sûr les nombreuses caricatures que la presse lui infligea : Oscar tenant des bottes et un stetson à bout de bras, déclarant que les mineurs du Colorado sont les hommes les mieux habillés d’Amérique ; Oscar, prévoyant l’interdiction de Salomé, et émigrant en France sous les traits d’un conscrit de l’armée française ; Oscar en esthète contre les athlètes, à Oxford ; Oscar en forme de Tournesol ; Oscar en créature publicitaire façon David-Ginola-qui-le-vaut-bien, vantant non plus un shampooing mais des chapeaux, des cigares et des partitions musicales. Bref, un beau travail aussi précis qu’élégant, et un angle original pour un écrivain qui ne l’était pas moins.
Le second constitue un autre « Wilde de poche », un petit manuel à avoir sur soi pour affronter n’importe quel sujet de conversation, même si vous n’avez pas la voix modulée et musicale du divin Oscar. Cher Oscar, anthologie de ses meilleurs mots, aura réponse à tout. Aussi, si vous vous voulez misogyne, au milieu d’une assemblée fort macho, pourrez-vous vous exclamer : « La seule façon de se comporter vis-à-vis d’une femme, c’est de lui faire la cour si elle est jolie, et de la faire à une autre si elle est laide. » Votre ami se marie ? Consolez-vous en répétant à part vous : » Les hommes se marient parce qu’ils sont las ; les femmes parce qu’elles sont curieuses ; les deux sont déçus. » Un banquier vous fatigue et vous reproche d’écrire des livres au lieu de jouer en Bourse : « Je ne veux pas d’argent. Il n’y a que les gens qui paient leurs factures qui en ont besoin, et moi, je ne les paie jamais. » En 49 sections, voici donc compilés pour vous, tirées de ses pièces de théâtre, romans et essais, voire de son procès, d’ébouriffants épigrammes et de flamboyantes reparties, sur des sujets aussi divers que pratiques, du tabac au plaisir, de l’égoïsme au génie. Un concentré de « wit » à absorber pour briller pendant les longs repas des fêtes de Noèl. Evitez tout de même, le soir du réveillon, la réplique suivante: « La famille, c’est tout simplement une meute de gens assommants qui n’ont pas la plus faible idée de la façon dont il convient de vivre et sont dénués du moindre instinct concernant le moment où il convient de mourir. » Sinon, laissez-vous pousser les cheveux et portez du velours ; vous serez le roi.