Ça va vite. Très vite. Une cavale désespérée où tout se joue en quelques heures. Ça commence par un geste absurde : un meurtre. Celui du mari de Griselda, maîtresse d’un compagnon d’infortune qu’elle finira par éxécuter (c’est aussi le narrateur). Puis deux. Puis trois. Comme ça, parce que la vie de nos deux protagonistes ne leur semblait pas à la hauteur de leurs espérances. Trop anodine, pas assez tournée vers la vie. Alors, les amants maléfiques se rebiffent. Exit la société conformiste. Place à la « rébellion », à la fascination-répulsion, au sang, au sperme, et toutes choses ressemblant à un supplément de vie.
Mais tout a une fin… Et après s’être consumés l’un l’autre, les amants se déchireront. Aboutissement de la tragédie qui les aura fait tutoyer le « dixième cercle » de l’enfer. Cette logique était sous-tendue dès le départ de l’intrigue. Cette dernière vaut surtout par la vitesse de ses enchaînements et le nihilisme des deux personnages, qui se croient seuls au monde. On se moque donc des invraisemblances et des approximations (Mempo Giardinelli sait plus de choses qu’il n’en dit sur les motifs de ces actes de suicides différés : c’est un art !), pour la bonne et simple raison que ce récit très vite lu (et pas nécessairement consommé) recèle de nombreux mérites : concision des descriptions, images saisissantes de la mécanique implacable du meurtre dans une société dont le corps est en pleine décomposition, analyse des comportements sexuels. Qu’ajouter, sinon que le talent fait tout pardonner.