Une bourgeoise, « de gauche », ayant besoin d’être servie, Mme Lemarchand, recherche une employée de maison. Mais il lui faut plus : la confiance, l’estime, la gratitude, l’amitié, l’amour qui sait, de la personne en question. Cette femme, ce sera Hilda. Le dialogue commence avec Franck, son mari. Il se poursuit avec lui, seul interlocuteur, mais aussi seul témoin, bien qu’il soit maintenu à distance, donc impuissant à contrer les plans de cette bourgeoise, de la lente déchéance de sa femme -par quels moyens, on ne le sait pas vraiment, mais l’imagination du lecteur fonctionne parfaitement. Car cette bonne bourgeoise s’approprie au fur et à mesure la vie d’Hilda, jusqu’à prendre sa silhouette, éprouver la joie qu’elle avait. Sa vulgarité n’a d’égal que la furie qui l’anime : détestation des autres -ses propres enfants compris-, volonté d’abaisser ceux qui l’entourent. La haine, dimension bourgeoise de la rage.
La démarche de Marie Ndiayé nous permet de voir en un clin-d’œil, par la fulgurance de ses images, tous les résidus de la véritable misère : celle d’une classe bourgeoise qui s’est étendue aux masses. Paroxysme de l’abjection ! Toute belle littérature n’est possible que dans l’équivoque. Il suffit parfois de forcer un peu le trait pour dévoiler ce qui est théoriquement enfoui. Par sa manière de capter l’infamie, Marie Ndiayé n’a pas manqué ce but.
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