Publication du patrimoine des élus, photos de la vie amoureuse du Président, conversations privées enregistrées sur smartphones, etc. : la transparence est l’un des mythes de notre époque, comme s’il fallait compenser le déclin des valeurs publiques par l’étalage de vertu privée et la dénonciation des vices intimes. Jointe aux croisades des groupes d’influence et lobbys en tous genre, cette manie peut vite déboucher sur des résultats explosifs, proches de l’Inquisition… C’est ce phénomène qui s’intéresse Benoît Duteurtre dans ce nouveau roman, une comédie sociale à ranger sur le versant « satirique » de son œuvre, comme La Rebelle ou Le Retour du général.
Simon, patron d’une commission Théodule chargée des libertés publiques, passe son temps au bureau à surfer sur des sites porno. Hélas, un virus informatique se met à dérégler les mails et à transférer des infos d’un utilisateur à l’autre. Et si quelqu’un découvrait à quoi il s’occupe pendant ses heures de travail ? Pour ne rien arranger, il commet une énorme bourde lors d’une interview, en proférant hors-antenne une blague idiote qu’un technicien malveillant met en ligne. Une cabale s’ensuit, orchestrée par des groupes de pression et des associations militantes… Avec son regard à la Marcel Aymé, Duteurtre met en scène le cirque médiatico-politique et croque ses personnages en caricaturiste. En contrepoint, une seconde intrigue, plus légère, raconte l’entrée du narrateur décédé dans un Ciel transformé en labyrinthe bureaucratique, et achève de conférer son allure de fable à ce bref roman caustique et souriant.