L’histoire se construit en deux parties : la première pour la vie réelle du personnage, la deuxième, pour sa vie fantasmée. Paul Stern est un homme malheureux, déçu par un père dont les idéaux s’effritent lorsqu’il devient riche, accablé par une femme qui ne le voit plus et qui, malade, part se réfugier dans un hôpital psychiatrique. Quel choix notre personnage a-t-il, sinon celui de partir à l’étranger pour oublier ce passé triste et raté, recommencer une nouvelle vie ? Mais à Hollywood, où on l’envoie écrire un scénario, les choses ne se passent pas comme il l’aurait voulu. Cette femme, Selma, qui ressemble étrangement à son épouse Anna, s’avérera tout aussi dépressive et décevante que sa femme « réelle ». Quant à son travail, il réduit à néant toutes les valeurs auxquelles il croyait en le corrompant au service d’un système marchand et cynique.
Cette deuxième vie américaine, rêvée, est une copie exacte de la vie réelle, mais en pire. Il y a là un jeu de miroirs entre femme et maîtresse, France et Etats-Unis, qui permet à Dubois, subtilement, de comparer les deux pays en montrant ce que pourrait devenir une France qui viendrait à s’américaniser. Le tableau des Etats-Unis est passionnant : Dubois fait découvrir un pays malade où règne une grande solitude humaine, où l’on ne sait quoi faire pour trouver un peu de bonheur, où l’on fréquente les ashrams et où on consomme les pilules du bonheur. Un pays de gens livrés à eux-mêmes, seuls, aux amours furtives, élevés par des pères et mères fantômes. Les Accommodements raisonnables, comme le dit le titre, est aussi une réflexion sur ce à quoi nos impulsions, nos désirs peuvent nous conduire, à savoir au pire. La Raison est ce garde-fou qui nous protège, assure notre survie, nous permet de rester tels que nous sommes, tels que nous devrions être, sans les séductions du pouvoir et des honneurs.
Le défaut du roman, sans doute, est de ne pas être suffisamment percutant, ou direct. Il donne, parfois, l’impression de tourner en rond. L’histoire reprend un peu son élan lorsqu’elle arrive sur le sol américain, mais manque tout de même de vigueur. Un petit Dubois. Dommage.