De la vie difficile de l’auteur en URSS au jour où il devient « officiellement » écrivain en Amérique… L’existence, pour lui, n’a pas été simple. En URSS, on faisait la queue pour manger. A New York, Gary, de son nouveau prénom (pour masquer ses origines), doit se battre contre les invectives de ses camarades à l’école hébraïque. Etre juif et soviétique n’est pas une mince affaire : il faut assumer d’être issu du monde des Méchants et supporter d’être mal aimé, surtout si on n’a pas de quoi se payer des vêtements décents…
Pourtant, malgré les difficultés, les brimades, les rebuffades, malgré aussi sa nature chétive d’enfant asthmatique, Gary continue son chemin jusqu’à la célèbre école Stuyvesant. Et là, ça se corse. Les élèves, la plupart d’origine asiatique, se livrent une concurrence à mort pour accéder aux Universités les plus prestigieuses. Devant une telle fureur de travail, Gary abdique. Que faire, contre cette armée de surpuissants ? Rien, sinon renoncer à faire son droit, au grand dam de ses parents, et se retrouver à la faculté marxiste d’Oberlin où le désœuvrement des étudiants correspondra à sa nature éprise de liberté. Gary s’enlise dans les beuveries et les soirées au haschisch débonnaires, se laisse pousser la barbe et dit « au revoir »aux campagnes politiques républicaines pour rejoindre les hippies…
Sa vie cahoteuse, il la raconte avec force rires et pitreries. Rien n’est jamais triste chez lui, même si tout l’est au fond : il sait mettre une distance entre les évènements et lui, pour créer cette atmosphère comique qui n’est pas sans rappeler Dickens et ses anti-héros. Il s’agit au fond de l’histoire d’un bon à rien sans consistance, qui surmonte des obstacles pour finir honorablement – il est devenu un écrivain célèbre. Certains reprocheront à sa veine comique de désamorcer le tragique des épreuves, mais la plupart se laisseront prendre au jeu cette prose infiniment drôle, riche, dense. Follement légère. Trop ?