Diogène le Chien (un animal qui ne s’embarrasse pas de fausse pudeur – l’homme était quant à lui accoutré du tribôn, vieux manteau élimé, et portait une besace contenant le nécessaire de survie – sans oublier le bâton, afin de mieux rosser l’inopportun) fit emprunter à la philosophie les chemins de la révolte. Une révolte anti-système, hors cadre politique et collectif, et ancrée dans la sphère morale et individuelle (Platon s’en remit-il ?). Pour cela, il disposait d’une seule arme, la parole, mais elle fut maniée avec brio. On peut y ajouter le rire et le sens de la répartie. A Athènes, les murs de la sociabilité s’effondrèrent sous la voix discordante de quelques hommes, communément appelés Cyniques. Parmi eux donc, Diogène contesta les valeurs prônées par la cité (culture, richesse, réussite, renommée, religion). Toutes choses séduisantes, mais qui, en définitive, assujettissent l’homme. Son disciple, Cratès de Thèbes, fit preuve d’un courage similaire. La leçon du maître fut entendue et mise en pratique : il n’était pas rare qu’il fît l’amour à sa femme Hipparcia en pleine rue. Longtemps, on s’interrogea sur le système de valeurs que présupposait ce type de comportement. Cette philosophie hautaine, pratiquant l’art du contre-pied, et choquante afin de mieux frapper les esprits timorés, est à la portée de tous. La somme investie dans cet ouvrage est en effet bien modique en comparaison des enseignements qu’il dispense. Notamment celui du droit à la différence.
Diogene et crates – Lettres (Les cyniques grecs)
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