Les années défilent, et c’est le sentiment d’une même ivresse qui ressurgit alors qu’on s’installe aux manettes des bolides de Wipeout 2048. De manière invariable, juste avant le départ, lorsque ces vaisseaux commencent à flotter au-dessus du sol, on se rappelle cette inertie si particulière qui distingue la série de son ainé F-Zero, plus terrien, plus magnétique. C’est là tout le confort d’une série qui permet d’en prendre le train à toutes les époques, sans crainte d’une perte ou d’un changement de formule : on sait que l’on s’amusera encore à jouer des subtilités de cette inertie, pour y glisser toujours plus vite avec souplesse et légèreté le long de courbes sinueuses et improbables, au rythme de la musique techno et de la tôle froissée des adversaires.
En définitive, les vaisseaux de Wipeout sont comme les madeleines du joueur. Leur pilotage procure le rappel d’un sentiment tout à la fois singulier et générique. Mais s’il est possible d’en retrouver le goût, c’est parce que le changement d’emballage le permet. Fluidité accrue, effets graphiques toujours plus poussés sont les moyens de ne pas trahir un certain idéal de vitesse et l’actualiser dans son époque. Pour cette raison, la série a toujours fait bonne figure en tant que vitrine technologique – notamment pour les machines de Sony -, comme le firent en leur temps les Wipeout 2097 (qui établit toutes les bases de la série), Wipeout 64 (avec son mode multijoueurs de folie profitant des 4 ports manettes de la Nintendo 64), ou encore Wipeout HD (témoin d’une génération de machines dont on retiendra surtout sa volonté d’impressionner l’oeil du joueur). Wipeout 2048 ne déroge pas à ce principe. Sur l’écran large et lumineux de la PlayStation Vita, le jeu scintille de mille feux, ébouriffant et sûr de sa recette. Chaque détail dans le décor ou chaque effet de particules et de lumière paraît justifier l’existence de l’objet que l’on tient dans les mains, et qui rend grâce à ce plaisir du jeu né de la vitesse.
Tout comme pour ses prédécesseurs encore, il n’y a pas de numérotation pour indexer Wipeout 2048 dans l’ordre réel de la série. Seulement une année (aux bons souvenirs des joueurs de Wipeout 2097), jetée comme un horizon éternel d’affects déjà présents et que le jeu s’évertue de maintenir. Par conséquent, Wipeout 2048 sur PS Vita n’ajoute rien que l’on n’ait déjà éprouvé dans son vécu de joueur, ou si peu. Des décors que l’on détache de leur anonymat jusque-là caractéristique de la série (on reconnaît là un stade, ici un métro ou là encore les rues d’une ville reconvertie en piste de course futuriste) permettent d’ajouter plus de détails aux décors. Le jeu permet aussi de s’essayer aux fonctionnalités tactiles et gyroscopiques de la console le plus naturellement du monde. Mais au fond, tout cela importe peu. Le plus important réside dans la garantie que le plaisir de la course demeure inchangé. C’est la promesse que chaque épisode formule, son unique raison d’être, comme la seule chose que le joueur peut exiger : que ses images soient dignes d’affects qui n’ont pas pris la poussière.