Quelque part entre Super Mario et Dark Souls, entre le pur jeu d’adresse et le monstre de difficulté qui vous fait aimer perdre, il y aurait, pourquoi pas, la série des Trials. Avec son concept épuré : une moto, des obstacles, on accélère, freine, s’incline, et c’est tout, Trials aurait presque l’air de rien. Mais c’est plutôt, l’air de rien, encore, une hallucinante machine de gameplay. L’une des plus étonnantes, et des plus fines aussi, expériences de ces dernières années. Pour sa troisième itération, la série revient en brillant de mille feux dans une version new gen qui rappelle à quoi aurait dû ressembler Motorstorm, en 2007. Tant mieux, mais quelque chose cloche un peu, très vite en fait, à la découverte du jeu. Est-ce cet épithète de Fusion, qui, en cuisine, en musique comme en jeu vidéo, est souvent un plan foireux ? Balancé dans un univers futuriste avec une voix d’androïde exaspérante balançant en continue des infos, le jeu s’autorise ainsi à aller plus loin, que jamais, dans des circuits fantasmagoriques aux tracés invraisemblables. Tout ça est très joli, et partir faire des loopings à deux cent mètres du sol, puis se voir rattrapé en plein vol par un enchainement de plateformes s’emboitant sous vos roues, c’est grisant, mais où est le jeu ?
Là où les précédentes versions de Trials proposaient une courbe de progression / difficulté continue, Fusion fait enchaîner ses cinq premiers parcours (sur huit) avec une facilité déconcertante. On se surprend à rarement buter, presque jamais reprendre un parcours pour améliorer son scoring (pourtant la base), et multiplier les médailles or ou argent. Il faut enfin débouler sur le sixième parcours pour voir la difficulté bondir alors soudainement, et retrouver les circuits tordus et éprouvants des épisodes passés. L’ivresse facile, puis soudain l’acharnement, l’envie permanente d’effacer sa défaite et recommencer – le joueur de casino n’est pas loin, avec un Trials. Sauf que pour arriver là, il a fallu passer par trop de complaisance, et quelques faibles nouveautés : conduire un quad, bof ; faire des figures en vol, on s’en passera merci. La grandeur du jeu, ce qui faisait sa beauté du skill, son degré d’exigence, sa pureté assez folle (tant cela se joue au millimètre), tout ça s’est un peu envolé dans des gadgets qui sont là pour faire oublier l’absence de raffinement des niveaux. On sent ici comme une volonté d’ouverture plus immédiate, une manière de se plier au fun en poussant le plus loin possible la difficulté. Ce qui est ni plus ni moins que le sacrifice de la subtilité.