En 1984, les Transformers avaient une raison d’exister. Ils étaient des jouets novateurs, complexes qui assuraient la transition entre le goût traditionnel-très trente glorieuses-pour les petites voitures et sa sortie (crise pétrolière oblige) vers le fantasme de la robotique et des intelligences artificielles. Dans une congruence d’aller-retour entre l’imaginaire fantasque, amoral des enfants et les propositions manichéennes du dessin animé s’était établi un contrat tacite de construction commune.
Qu’importe alors la résurgence de ce phénomène pop culturel de dernière catégorie par le truchement des films de Michael Bay et son témoignage crépusculaire d’un imaginaire hollywoodien forcé de fouiller les poubelles de la culture kids pour se trouver du cash flow en période estivale. Après tout, l’insignifiance est le propre du job d’été. Ce qui est plus fâcheux en l’occurrence et à l’examen de cette Chute de Cybertron (voir notre chronique de La Guerre de Cybertron), c’est d’avoir subordonné le matériau lourd de cet univers risiblement pauvre à, 1) l’inanité des productions de Bay (d’un point de vue scénaristique) et dans un second temps, 2) aux canons en vigueur du jeu de tir à la troisième personne (couloirs, upgrades, déluges de scènes scriptées). Malgré un étalonnage qui contraste fortement les couleurs primaires (syndrome « j’éclate la rétine des plus de 8 ans »), le jeu est beau, riche en détails et doté d’élégants éclairages et effets pyrotechniques. Une direction artistique et technique toujours court-circuitée par la platitude de l’action, la lenteur des véhicules « Transformés », le caractère impersonnel de sa proposition de jeu et le jmenfoutisme global que nous inspire cette guéguerre des robots sur leur planète en alu.
Plutôt qu’un titre sur, il eut fallut un jeu avec les transformers. Parfait contre exemple de cet écueil, les jeux vidéo Lego délivrent à chaque titre une réinterprétation ludiquement solide, burlesque et pourtant fidèle des univers qu’ils visitent (Star wars, Batman, Harry Potter…). Certes, le paradigme Lego a pour avantage d’être une simple mais brillante modalité, une pure construction de l’esprit mariant le rond et le carré. Un bon jeu vidéo estampillé Transformers exigera de revenir aux fondamentaux de ce que représentaient les figurines du même nom, le plaisir de l’articulation, de la métamorphose partielle et surtout une porte ouverte sur l’imaginaire enfantin (dans toute sa cruauté, pourquoi pas) pour liquider les paraboles foireuses des blockbusters estivaux.