Dix intros impubliables, autant de paragraphes illisibles et quelques axes de traitement plus tard. Ecrire sur Four swords est épuisant. Pad en main, c’est pourtant limpide. Une réalisation 2D enchanteresse, une maniabilité sans faille, des énigmes astucieuses, du multi-joueurs innovant… Du Nintendo, ni plus ni moins. Du Nintendo, justement. Si l’on trouve quelque réconfort à entendre parler de gens riches et malades, il est déjà plus éprouvant de partager leurs névroses : crise identitaire, dépression et inventaire. Les dernières productions Nintendo nous avaient pourtant déjà initié aux psy-shows à base de grands déballages (Wario ware, Paper Mario 2). Il n’empêche, c’est toujours embarrassant. A commencer par cette façon de parler de soi au passé. Four swords illumine l’écran d’un âge d’or 16 bits qu’on ne finira jamais d’enterrer. Une maison, un buisson, une dalle de pierre. Le decorum du jeu recycle celui du mythique A Link to the past. On pourra toujours rétorquer que la cohérence esthétique valait bien un nivellement par le vieux (le jeu s’affichant sur deux machines aux capacités graphiques très différentes). Sauf que de son côté Minish cap sur GBA proposait un environnement beaucoup plus abouti et varié.
En solo, le joueur se coupe en quatre. En multi, chaque joueur contrôle un Link. Contre eux se dressent des multitudes d’ennemis. Comme pour remplir un royaume d’Hyrule, autrefois adulé par des millions de joueurs, aujourd’hui franchement déserté. Les plus grandes aventures d’heroic-fantasy se jouent désormais en ligne. Et si depuis peu, « online » n’est plus un gros mot dans la bouche des « executives » de Nintendo, chez eux, on en est toujours au online « de salon ». Un GameCube en guise de serveur. Des GBA dans le rôle des clients. Le système est intuitif, ingénieux et inédit. Mais c’est un pis-aller, un dispositif autiste. Autre symptôme, autre malaise : une impression d’inventaire du gameplay « à la Zelda » renforcé par l’impossibilité de cumuler les objets. Ici, les bottes de Pégase, par là, la lanterne. Au même titre que les décors, les plaines d’Hyrule regorgent de ces items familiers et du geste qui leur est associé. Une fois encore, malgré le sentiment de visiter, à plusieurs, le parc à thème de Zelda, demeure un game design irréprochable. Alors quoi ? On pourrait se convaincre que le spin off est dans l’air du temps (FF X-2, Metal gear acid, etc.). Difficile quand même de ne pas voir ici les symptômes d’un éditeur en pleine crise créative. Pas que Nintendo n’ait plus d’idées, loin s’en faut, mais l’inventivité de Four swords est multi directionnelle : une foultitude de bonnes idées pour en couvrir une grosse et mauvaise. Paradoxalement, c’est ce qui fait de Nintendo l’un des éditeur les plus passionnant à suivre. Cette impudeur à livrer in game les résultats de son autocritique, l’inventaire de ses doutes. Pour l’heure, perdu dans les plaines d’une nostalgie qu’il avait lui-même symboliquement submergée (The Wind waker), le voilà à nouveau seul, à la recherche de son Excalibur, l’item ultime. Celui qui lui rendrait son trône et annoncerait le retour du roi.