Voler les clés du musée et s’y perdre après la fermeture, c’est finalement toute la promesse d’une compilation retro. Dans un monde déserté par l’arcade, ces rendez-vous égoïstes avec l’histoire offrent un cours de rattrapage aux joueurs qui refusent de passer par la case émulation. Mais là ou une telle entreprise se devrait d’offrir une rétrospective cohérente sur le travail d’un éditeur ou de multiplier les documents d’époque retraçant la genèse de ces créations, Taito legends 2 nous jette les clés à la figure et file en claquant la porte, d’un air de dire « démerdez-vous ! ». Nous voilà seuls, sans la moindre notice et en fait d’expo, le lieu a tout d’un vide grenier…
Dès les premiers pas, on peine à saisir la logique du commissaire. A trop vouloir embrasser l’histoire de la compagnie, celui-ci plonge dans sa collection comme on piocherait une boule de Bingo. Pourquoi Wild western ? Sylvalion, à quoi bon ? Et ce Puzzle bobble 2 qui n’en finit pas de s’épuiser… Incohérente, parfois anecdotique, la sélection donne à cette compile un côté cheap. Pire, beaucoup de titres souffrent ici d’un portage à la truelle, entre une émulation sous tranquillisants et une maniabilité parfois instable. Passées ces avaries techniques, on esquissera un sourire en revenant sur les tactiques peu scrupuleuses de constructeurs d’arcade passés maître dans le domaine des illusions. Ainsi, Violence fight, peut-être le plus mauvais jeu de combat 80’s avec Street smart, noyait son inutilité sous des sprites gigantesques. Et Kuri kinton, beat’em-up 2D aux inspirations Toriyama, ne devait son salut qu’aux impressionnantes fresques de dragon qui sonnait le début de duels approximatifs. A tout prendre, on replongera donc dans les valeurs sûres de la firme : Liquid kids, Darius gaiden, Elevator action returns, autant de titres que les joueurs sérieux connaissent sur le bout des doigts et qui ont déjà fait l’objet d’adaptations 32 bits. La visite réserve quelques découvertes mineures, comme l’astucieux puzzle Cleopatra fortune ou le méconnu Bonze adventure, petit jeu d’action à la sauce bouddhiste qui s’était déjà illustré sur PC Engine. En parcourant la galerie d’un pouce distrait, on tombe finalement sur la pièce de résistance, ce G-Darius étincelant qui justifie à lui seul l’existence de cette compilation. Emulé dans la douleur sous MAME, porté sans grand succès sur PlayStation, ce chef-d’œuvre méconnu s’offre ici dans toute sa démesure.
Faisant suite à l’excellent Gaiden, G-Darius conserve la structure en arborescence qui a fait la réputation de la série tout en dépoussiérant ses mécaniques. Ainsi, le système de capture ball permet de prendre le contrôle de n’importe quel adversaire pour s’en servir comme d’un module offensif. Mais ce sont surtout ses boss titanesques qui ont forgé la légende de cet épisode. Là, Taito lâche la bride à ses ambitions de mise en scène dans des introductions aux mouvements amples et excessifs, les combats exténuants s’achèvent dans des duels de laser qui nécessitent de marteler le bouton de tir et l’on file le cœur battant vers la prochaine zone, porté par les rythmes acides de Zuntata. Rayonnant d’ambition, G-Darius émerge de cette compilation comme un shoot incandescent et précieux, le seul équivalent crédible aux symphonies barbares de Radiant silvergun dans le domaine du shoot horizontal. Le découvrir parfaitement conservé au milieu de ces bibelots endormis, c’est éprouver un sentiment comparable à la découverte d’un Vermeer à la braderie du village.