C’est le moins qu’on puisse dire : le monde vidéoludique n’a pas été très tendre jusqu’à aujourd’hui avec la licence Star Trek. Nombreux sont les éditeurs à avoir malmené la série originale de Gene Roddenberry et ses déclinaisons « modernes » –The Next Generation, Deep Space Nine et Voyager– à travers maintes productions toutes plus pitoyables et ratées les unes que les autres. La bonne nouvelle, c’est que Raven Software (Hexen, Heretic) sauve enfin la série. Star Trek Voyager : Elite Force est un jeu qui a de la tenue, du corps, de la consistance quoi. Qui plus est, les concepteurs réussissent l’exploit de nous immerger d’assez belle manière dans l’univers en question.
L’équipage de l’USS Voyager se trouve mystérieusement expulsé à 70 000 années-lumière hors de l’espace de la Fédération, autrement dit paumé dans le Delta Quadrant. Une zone totalement inexplorée forcément peuplée de races non référencées par « Big Starfleet ». Ok, la petite histoire du Cap’taine Janeway et sa bande on la connaît, pas besoin d’en rajouter une couche (merci Canal Jimmy !). Quoi qu’il en soit, il s’agit ni plus ni moins ici d’intégrer l’équipe et d’enfiler le légendaire pyjama pour faire face à l’agresseur. Vous c’est Munro, un brave gars (comprendre : un bon soldat soumis corps et âme à la bonne vieille Fédé colonialiste) bien décidé à prendre du galon. Pour ce faire le joueur écoutera attentivement les ordres et autres recommandations du vulcain-pisse-froid de service, le lieutenant Tuvok.
Sans le savoir, on entame la partie en pleine simulation holodeck à batailler avec des cyborgs dont la particularité consiste à assimiler leurs adversaires -autrement dit pour nos amis trekkies, les Borgs. Le temps de se faire la main sur ce quake-like sans surprise en quelque sorte. Mais l’aventure commence véritablement lorsqu’une salve de lasers s’abat sur le Voyager. Pas de bol : tombé au beau milieu d’un ramassis d’épaves galactiques, le vaisseau de la Fédération vient de déclencher malencontreusement un dispositif ennemi de défense. C’est quoi ce bordel Munro ?! Allez hop ! briefing, deux-trois questions spéciales suce-boules, définition des équipes et répartition des tâches, faut pas que ça traîne ! Direction le turbo-lift, étage équipement. Une petite séance d’holodeck s’impose pour apprendre à manier le matériel offensif maison : le phaseur évidemment, mais aussi fusil à compression ou encore le I-Mod conçu à l’origine pour venir à bout des Borgs. Vous voilà paré pour la téléportation. Et la bonne trentaine de missions successives qui opposera la fine équipe aux Etheriens, aux fameux Klingons, aux Malons et aux Faucheurs, mystérieuse race d’aliens à propos de laquelle Starfleet ne dispose d’aucune information…
Sympa, on s’amuse. Un peu. Elite Force est effectivement ce qu’on a fait de mieux en exploitant l’univers de la série. Hélas, comme les Borgs assimilent les gars de la Fédé, Raven Software n’a rien fait d’autre que d’assimiler le moteur de Quake 3. Version relookée, plutôt réussie d’ailleurs. Autre assimilation notable : l’imparable Half Life. Même profondeur scénaristique (les difficultés rencontrées par vos coéquipiers, très souvent en mauvaise posture, vous donnent du fil à retordre), rôle majeur de la narration et des cinématiques, et importance de la discrétion/réflexion. On s’imagine même dans la peau de Gordon Freeman lors des phases les plus tactiques. Appréciable en mode multijoueurs (Holomatch).
Half Life, on s’en écarte en revanche d’un point de vue intelligence artificielle. Ici, les adversaires ne prennent aucune initiative bluffante, capable de nous faire croire un tant soit peu à un écart de scénario. Ce qui a pour inconvénient d’accentuer franchement la linéarité du jeu et, par extension, de limiter l’immersion du joueur. Dans le genre absurde, notons également la présence des Boss de fin de niveau. Raven n’en démord pas : séquence bourrinage obligatoire. Disons que ça relève un peu le niveau de difficulté du jeu, pas bien méchant globalement.
Plus grave encore : la config idéale pour apprécier pleinement le soft n’est pas encore disponible en magasin. On exagère à peine tant le jeu saccade régulièrement, y compris sur une machine dernière génération. De même, la lenteur des chargements qui interviennent lors des différents passages de niveaux, et avant l’affichage des cinématiques, a de quoi rebuter le plus patient : comptez deux-trois bonnes minutes pour charger une partie.
Cela dit, Raven est bel et bien cette équipe de développeurs qui aura su, avant les autres, fidèlement retranscrire l’univers de Star Trek sur micro. Dommage qu’il faille se contenter d’un simple bon vieux quake-like de base pour en arriver là.